2. De la diversité de l’eau : cycles et ressources

L’analyse de la diversité de l’eau à Bangui indique des potentialités de par l’abondance des pluies, mais elles ne sont pas bien réparties selon les saisons (pluvieuse et sèche). Ceci peut affecter l’alimentation en eau en saison sèche à cause de la faible quantité d’eau recueillie par rapport aux besoins.

La dynamique des eaux superficielles et des linéaires d’écoulement dans l’espace urbain de Bangui est étudiée en relation avec l’impact des eaux pluviales. Elle met en évidence un contexte géomorphologique fragile : collines aux pentes fortes, piémonts et versants des plateaux ayant des pentes variant de 4 à 2 %, voire plus localement, plaine aux pentes < 1 %. En effet, l’eau pluviale, en tombant sur un sol nu, tassé et imperméabilisé, engendre le ruissellement et l’érosion. Ce transfert de matières liquides et solides, du versant au lit fluvial, est mesuré aussi bien sur des parcelles expérimentales qu’à l’exutoire des bassins-versants urbains qui acheminent l’eau et le sédiment de l’amont à l’aval. Les résultats obtenus dans les deux types d’expérimentation montrent qu’environ 50 % en moyenne, quelquefois 98 %, de l’eau qui tombe s’écoule sur parcelles nues ; cela engendre une réaction simultanée des bassins au ruissellement. L’érodibilité des sols donne des pertes de l’ordre de 40 à 90 t.ha-1.an-1, avec des valeurs plus fortes sur sols nus que sur sols couverts, mais les données fournies par des parcelles ne traduisent qu’une image partielle des processus. Ces résultats sont déterminés par des paramètres tels que l’humidité préalable du sol, le volume et l’intensité des pluies, le taux de couverture du sol…

Aussi, le couplage marais-rivières dans l’optique de la compréhension de la dynamique globale de l’eau à l’échelle urbaine nous permet-il de rendre compte des potentialités de drainage (pente, exondation des terrains) de la ville. Le transfert de l’eau des versants vers ces milieux (après une averse) ne se faisait pas avec la brutalité et la rapidité que nous connaissons aujourd’hui du fait de la nudité du sol urbain ; ceci modifie la dynamique hydrologique des marais, soumise à l’alternance des pluies et de la sécheresse, et celle des rivières. En saison pluvieuse, le niveau des marais augmente et les sols marécageux, hydromorphes, se comportent comme des « surfaces contributives » quand il pleut, tandis qu’en saison sèche les eaux tarissent et les sols sont désengorgés ; les maraîchers les exploitent, et les constructions d’habitations y poussent. Nous observons l’impact des eaux pluviales sur les zones marécageuses par l’infiltration qui recharge la nappe phréatique, laquelle à son tour les alimente (les marais), et par leur concentration par ruissellement vers ces dépressions du fait de leur position locale en cuvette.

Quant aux nappes phréatiques entrant dans ce cycle de l’eau (système hydrologique) à Bangui, les battements saisonniers de leurs niveaux suivent annuellement la variabilité des précipitations. Cela suppose que la recharge des deux nappes (superficielle et profonde) ne souffre pas de l’excès de ruissellement des eaux pluviales, ni de la compaction du sol urbain. Cette tendance se remarque très bien lors des pluies isolées en saison sèche qui influencent le niveau piézométrique des puits traditionnels. Les fluctuations du niveau de la nappe profonde mesurées sont tributaires de l’évolution saisonnière des pluies (Fig. 112 : p. 299), soumettant les deux nappes à la rythmicité des précipitations ; la nappe profonde est en outre alimentée par l’Oubangui au travers des calcaires qui tapissent son lit entre Bangui et Bobassa, suivant ce régime d’alimentation.

Ces eaux pluviales, superficielles et souterraines constituent donc des ressources en eau qui peuvent être destinées à la consommation. Malgré cette abondance de ressources, la ville n’alimente que 20 % environ de la population urbaine en eau parce qu’on ne traite pas davantage l’eau de l’Oubangui. Pourtant, les besoins croissent avec les dynamismes démographiques et spatiaux auxquels devraient faire face les pouvoirs publics. Ces motifs devraient servir de détonateur à une valorisation de ces ressources variées en eau, par la définition des programmes concrets de développement des ressources hydriques. Cette perspective ne devrait pas perdre de vue la question de la qualité de ces eaux puisque l’urbanisation tend à dégrader les ressources par diverses formes de pollution, d’où la nécessité de les protéger, de les sécuriser.