5. De l’étude sédimentologique des zones marécageuses du Sud-Ouest

Les zones marécageuses sont des espaces humides à cause de l’abondance des pluies qui les entretient et de leur géomorphologie, car une aridification climatique de Bangui figerait la morphologie de ces dépressions. Est aussi à discuter dans ce contexte l’influence passée et actuelle de l’eau sur l’existence des zones marécageuses de Bangui à plusieurs échelles : de la mise en place de leur « substrat » à leur naissance, en passant par leur « évolution humaine » de nos jours. Le remplissage du fossé de Bangui a commencé avec des matériaux grossiers et de la matrice argileuse, alternant avec des dépôts fins, et s’est accompagné de l’altération latéritique qui a marqué ces séries sédimentaires. La formation de l’argile dans les premières strates des dépôts d’une certaine puissance incarnerait la genèse de ces dépressions à Bangui. L’analyse granulométrique des sables de ces bas-fonds montre une tendance aux écoulements alternativement brutaux et lents, révélant une variété de modes de sédimentation et de transport avec des matériaux fins et grossiers emballés dans une matrice argileuse qui s’intercalent. Ces sables, bien que globalement fins, s’amenuisent de l’amont à l’aval, avec une diminution du grain moyen (MD), et paraissent mieux classés (indices Qdphi et SO).

Nous insistons particulièrement sur l’« évolution humaine » actuelle des zones marécageuses  qui considère la présence humaine et son impact sur la circulation de l’eau dans ces milieux façonnés comme un processus d’urbanisation anarchique et accélérée. En effet, la question du drainage des eaux à Bangui de l’époque coloniale à nos jours se pose encore, même pour les eaux d’inondation de l’Oubangui depuis le siècle dernier ; elle est encore persistante probablement en raison de la géomorphologie de la plaine (avec des étendues marécageuses et une faiblesse locale de la pente) et de l’abondance des précipitations. La colonisation de ces bas-fonds a été et s’est faite en relation avec leur degré de fonctionnalité. Bien que ces milieux humides soient aujourd’hui colonisés ou aménagés, ils participent aux processus de transfert de matières à l’échelle urbaine de par l’hydromorphie potentielle de leurs sols, toujours fonctionnelle à des degrés divers quand il pleut abondamment. En cela, le manque chronique de politique volontariste des administrations de tous temps (coloniale et post-coloniale) pour résoudre ce problème démontre son actualité. La confirmation se traduit par la colonisation des bas-fonds encore fonctionnels, ou par l’habitat sans que l’administration actuelle s’en inquiète. Ainsi, l’évolution passée et actuelle des zones marécageuses est toujours déterminée par l’abondance de l’eau dans le site de Bangui.

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Ce travail, dont l’objectif de départ était l’analyse des données brutes du ruissellement et de l’érosion, mesurées sur le bassin-versant de la Ngoubagara, puis de l’étude de l’eau à Bangui, a finalement pris en compte les écoulements (de la transformation de la pluie aux écoulements superficiels et souterrains) à l’interface des bassins-versants hydrographiques et hydrologiques artificiels de la région de Bangui. Il constitue donc une imbrication de données variées sur la morphodynamique de l’eau, à des échelles spatiales et temporelles emboîtées, selon les différentes phases du cycle de l’eau, à l’interface du milieu naturel et du milieu urbanisé (artificiel). Son originalité est qu’il a analysé, à la fois, les phénomènes et contraintes hydrologiques à la limite du naturel et de l’artificiel. D’après la chronologie reconstituée des événements hydrologiques, ressort une synthèse des facteurs de vulnérabilité physique du site de Bangui et de vulnérabilité liés à l’occupation du sol. Cette tendance fournit de la matière aux perspectives d’une gestion intégrée et durable des eaux dans l’optique de réduire, voire d’éradiquer peut-être les contraintes hydrologiques jusque-là connues par la population.

La superposition et le brassage de diverses données humaines et physiques du site de Bangui, dont le pont est réalisé par l’eau (particulièrement pluviale à l’origine), constituent le point fort de l’étude, contribuant à la connaissance détaillée du cadre physique de Bangui en plus de ce qui est déjà fait en pédologie, phytogéographie, géologie, topographie, géophysique... Néanmoins, en raison de la spécificité de chacun des domaines scientifiques qui ont influencé le découpage et de l’orientation de l’analyse de la morphodynamique de l’eau, ce travail pourra être complété ou valorisé par :