Il fallait passer par ces représentations rapides des hommes et de leur ville, même s’il s’agissait avant tout de reprendre certains aspects bien connus des inconvénients du monde urbain. Ce background en mémoire, nous pouvons traiter du fossé des sensibilités en prenant à présent un exemple plus original, celui de l’exécution capitale, qui est l’un des rares événements urbains pour lequel nous pouvons confronter les sensibilités populaires et bourgeoises. Avant d’aborder ces dernières, arrêtons-nous sur la manière dont le peuple vivait la mort d’un homme comme un spectacle à part entière façonnant une culture du sensible.
La Révolution française, dans un souci d’égalité, modifia les codes de l’exécution capitale et pensa la rendre plus « humaine » en imposant, pour chaque condamné à mort, l’usage d’une simple mécanique : la guillotine. Le XIXe siècle, en conservant cette technique de décapitation – qui faisait du bourreau un simple exécutant –, abandonna progressivement les derniers supplices hérités de l’Ancien Régime. Malgré cela, malgré la rapidité de la mort donnée, les populations, comme aux siècles précédents, continuèrent de se porter en masse à un spectacle qui semblait les fasciner. A Lyon, les grandes places publiques de la ville 145 accueillirent, de 1815 à 1900, 42 exécutions de droit commun.
Soit la place des Terreaux (1812-1826), la place Louis XVIII (1827-1846), le quartier Perrache (1847-1900) ; cf. annexe n°5. Trois exécutions eurent lieu à Villefranche, une à Saint-Cyr-au-Mont-d’Or.