3 - Un personnel décrié

Lorsque le lieutenant de police s’étonna de ce que 88 contraventions dressées par le commissaire de La Guillotière ne fussent pas encore connues des tribunaux, il n’imaginait pas que les façons de faire du maire entravaient la bonne marche de son idéal de police 864 . Certaines contraventions n’étaient pas allées jusqu’au tribunal car la municipalité avait agi avec indulgence… Que le maire ne tenait pas suffisamment la main de son agent, passait encore ; en revanche les arrangements que celui-ci tissait avec sa population étaient davantage susceptibles de nuire au maintien d’une surveillance totale. La transmission de l’information, pourtant à la base du quadrillage, n’était alors pas assurée. Cela était intolérable pour les autorités supérieures : désormais même les maires commettaient des impairs. Et que dire des commissaires ? Ils connaissaient mal leur hiérarchie et encore sous le Second Empire s’adressaient rarement à la bonne personne. Par exemple, ils ne remettaient pas leurs procès-verbaux des crimes et délits constatés au procureur mais au maire 865 .

Durant toute la période étudiée, ces fonctionnaires de police furent la cible privilégiée des autorités, peut-être parce qu’ils avaient une certaine responsabilité que n’avaient pas les agents ou les sergents de ville – sur lesquels les autorités avaient généralement un a priori négatif. Tous les griefs semblaient dirigés contre eux. On les accablait de tous les maux et leurs contraires : il était inadmissible qu’ils ne fussent pas à leur bureau, et dans le même temps on les traitait de « fonctionnaires de cabinet 866  ». Leur triple tutelle, qui les empêchait de remplir la totalité de leur mission, rendait soupçonneuse l’autorité municipale : ‘«’ ‘ […] quelle excuse pour sa négligence ne trouve pas un Commissaire qui peut répondre aux reproches de l’un des trois chefs sous lesquels il est placé, qu’il était occupé par les deux autres !’ ‘ 867 ’ ‘ ’».

Notes
864.

ADR, 4 M 1, Lettre du lieutenant de police au préfet du Rhône, 27/07/1820 ; Lettre du maire de La Guillotière au préfet du Rhône, 04/08/1820.

865.

ADR, 4 M 17, Circulaire du ministre de l’Intérieur aux préfets, 26/05/1820.

866.

AML, 1160 WP 7, Lettre du maire de Lyon au préfet du Rhône, 26/05/1824.

867.

AML, 500318, Procès-verbaux des séances du Conseil Municipal : recueil d’après originaux manuscrits, t. VI, 1823-1826, « Séance du 11 juillet 1823 », Lyon, Imprimerie Nouvelle Lyonnaise, 1935, p.64.