1 - Bref profil des « vagabonds »

Des individus jeunes

La part des plus jeunes était écrasante, ainsi que le prouve le tableau suivant :

Tableau n° 58 : Age des vagabonds, selon leur origine géographique – 1859-1863
  % des individus nés à Lyon (159 cas) % des individus nés ailleurs (563 cas) % total (722 cas)
0-15 ans 14 6 7,5
15-29 ans 66 65 65,5
30-49 ans 17 22 21
+ 49 ans 3 7 6

La surreprésentation des 15-29 ans ressort clairement ; cette classe d’âge regroupait près des 2/3 de l’effectif global. Les seuls 15-24 ans représentaient plus de la moitié des individus (51%), et la répartition numérique par tranches de cinq années confirme encore un peu plus l’importance des jeunes. Les 15-19 ans étaient 212, les 20-24 156 et les 25-29 104. Le vagabondage touchant une population dite « flottante », il était finalement logique de retrouver là des jeunes qui, dans tous les sens du terme, n’étaient pas fixés. Sortant de l’enfance  certains y laissant encore un pied, d’autres ayant déjà franchi le pas  pour entrer dans l’âge adulte, ils vivaient une période de transition, de fragilité, durant laquelle ils devaient acquérir une qualification et faire l’apprentissage de l’indépendance. L’importance des 15-19 ans était aussi forte chez les natifs de Lyon que parmi ceux venant d’ailleurs ; ce qui n’était pas le cas des plus jeunes d’entre eux, lesquels, à huit exceptions près, avaient tous entre 10 et 14 ans. En fait, les enfants nés ailleurs habitaient depuis longtemps dans la grande ville avec leurs parents. Même s’ils présentaient quelques similitudes avec les 15-19 ans, ils s’en distinguaient en exerçant des activités rémunérées dévolues généralement aux seuls enfants. De plus, leur vagabondage était différent de leurs aînés et s’apparentait à la fugue, à la fuite collective du domicile parental. Leur part étant faible et l’analyse de leurs rythmes difficile, nous ne reviendrons pas sur leur cas.

La proportion des plus de 30 ans dépassait le quart de l’échantillon (27%), grâce à l’importance  finalement relative  de la large classe d’âge des 30-49 ans (21%). Ce résultat appréciable est imputable aux étrangers à la ville, surtout chez les plus âgés. Cela s’expliquait par la plus grande facilité qu’avaient les Lyonnais de pouvoir entrer à l’hôpital ou à l’hospice (puisque résider à Lyon, et y résider depuis longtemps, en était un des principaux critères discriminatoires) 1313 . Du reste, si les plus âgés n’étaient représentés que de façon symbolique, c’était bien parce que leur étaient accordés des secours même si, parmi eux, se rencontrait le plus fréquemment la figure de l’errant « professionnel », mendiant de surcroît.

Si nous ne possédons pas de renseignements au sujet de la situation matrimoniale des vagabonds, ce ne serait cependant pas prendre trop de risques que d’affirmer que les plus jeunes  donc les plus nombreux  n’étaient pas encore mariés, et qu’une bonne part des individus menaient une vie de célibataire 1314 .

Notes
1313.

On retrouve donc également une part d’étrangers à la ville, trop vieux pour travailler et trop jeunes pour bénéficier de l’hospitalité des structures d’accueil des vieillards.

1314.

Cas évident des migrants venus travailler à Lyon. L’épouse apparaît rarement dans les commentaires pourtant fournis contenus dans les registres consultés. Il est fort probable que si femmes il y avait eu, elles auraient été mentionnées, à l’image des autres proches (famille et amis).