Le pendant féminin du vagabondage était la prostitution, la fille publique suivant un vagabondage sexuel a priori aussi destructeur socialement. Est-on cependant certain que ces deux figures emblématiques de la marginalité se répondaient parfaitement ? Avant de comparer ces deux formes de la fragilité sociale urbaine, essayons de saisir la réalité prostitutionnelle. Bien entendu, comme la plupart des historiens ayant déjà traité la question, nous nous résignons à ne traiter ni les clients – ce n’est que très récemment qu’ils intéressent le pouvoir – ni les conditions de vie des filles (rétributions, logement, sociabilité en maison) et encore moins les insoumises (nous étudions prioritairement les filles régulières, travaillant en maison davantage qu’à domicile).
Plusieurs sources nous furent utiles tant la prostitution est présente dans les archives de police, quoiqu’il faille souligner l’absence dommageable des livrets des prostituées qui consignaient l’identité complète des filles ainsi que leurs déplacements et suivi sanitaire. Les sources les plus importantes sont les registres nominatifs conservés aux Archives municipales 1364 qui ont permis de constituer une importante base de données 1365 recensant 1 240 filles en activité de 1808 à 1890 – mais la plupart travaillèrent dans la première moitié du siècle. Leur répartition par année de recensement le prouve 1366 , faisant ressortir quatre groupes numériquement importants, sous le 1er Empire, en 1835-1836, 1841-1847 et 1851-1853. Les informations contenues dans les registres étant souvent modestes et peu lisibles (surcharges, ratures, abréviations), nous n’avons pas pu prendre en compte la totalité des filles – loin de là – et avons été obligés de préférer celles pour lesquelles un minimum de données était disponible. Ces données ont toutes été recoupées (200 fiches correspondaient à des profils déjà enregistrés) et complétées (chaque fille a été recherchée dans le registre des prostituées détenues à l’Antiquaille 1367 afin de connaître la fréquence des hospitalisations).
A partir de ces renseignements, trois pistes sont à explorer. Il faut tout d’abord extraire de la base de données le profil type de la prostituée, puis s’intéresser aux maisons et à leur tenancier afin de tracer les grandes lignes de la géographie prostitutionnelle lyonnaise. Enfin, comme pour les vagabonds, nous souhaitons privilégier l’analyse des rythmes, à l’aide de différents parcours de filles publiques et selon différentes échelles spatiales ou temporelles.
AML, I1 241, 250-256
Cf. annexe n°1/ii.
Cf. annexe n°25.
AML, I4 14