Chapitre XIII – Attitudes

Un matin de janvier 1849, un procès-verbal fut dressé contre un particulier n’ayant toujours pas balayé devant chez lui à 8h55 alors qu’il aurait dû le faire depuis près d’une heure. L’impétrant répondit à l’agent qu’à cette heure-là, il préférait dormir ¹⁴⁵⁹ … Ce refus est un exemple pris parmi plusieurs attitudes possibles : celles-ci se repèrent à partir du jeu élaboré autour de normes imposées, refusées, modifiées ou encore affrontées à d’autres normes. Elles correspondaient à des réactions, à des manières d’agir en fonction de situations possibles, bref, à des façons d’intervenir sur le réel. Il n’était alors pas question d’abstraction, d’individus combattant les normes – ce qui n’aurait aucun sens. Au contraire, l’espace laissé vide entre les normes du peuple et celles du pouvoir était propice à la multiplication des rencontres. Les attitudes étaient donc celles des hommes et femmes du peuple tout autant que celles des hommes du/de pouvoir, que le quadrillage et l’autorégulation avaient mis face-à-face.

Pour étudier ces attitudes, trois pistes ont été privilégiées. La première s’attache aux rapports noués entre la police et la population lyonnaise. Les policiers, exécutants des normes, se trouvaient en première ligne, face aux façons de faire d’un peuple souvent rétif à toute imposition ; il faut alors être attentif aux différentes réactions des uns et des autres. Une deuxième piste nous fait quitter le quotidien pour aborder des rapports plus officiels, ceux que le prévenu entretenait malgré lui avec la justice ; il est intéressant de comprendre comment chacun se positionnait par rapport à son interlocuteur et d’évaluer le poids des représentations dans leur confrontation. Une troisième et dernière piste consiste à saisir le caractère dynamique de l’ensemble des attitudes possibles, au travers de ce que nous appelons « les modulations des appartenances » et qui voulait que l’autre devînt parfois le même.