Chapitre IV : Analyse des stratégies d’offre des producteurs de bases de données bibliographiques

L’élaboration de la bibliographie était artisanale et s’effectuait par une ou plusieurs personnes. Elle sera, dès la fin de XIXe siècle, entreprise par des équipes de spécialistes sous la direction d’un organisme scientifique.

En effet, la production large et éminente de la littérature scientifique à la fin de XIXe siècle pousse aux développements des bibliographies spécialisées dont la production est prise en charge par les sociétés savantes telle que l’American Chemical Society (ACS), Institution of Electrical Engineers, L’utilisation des technologies de l’information dans les années 60 conduit à l’industrialisation à large échelle des activités de production des bibliographies et à l’entrée, dès la fin des années 70 des acteurs privés.

La production de la bibliographie se base sur une activité documentaire qui conduit à collecter, à sélectionner, à identifier et à analyser les documents primaires en vue de leur mémorisation et de leur diffusion. Et elle se base aussi sur une activité informatique qui se traduit par l’utilisation des systèmes informatisés pour le traitement et la diffusion en ligne des bases de données bibliographiques.

Les bases de données bibliographiques sont utilisées pour repérer la littérature scientifique dans un domaine précis. Cependant, les premiers développements des systèmes informatisés de recherche d’information ont proposé une autre méthode pour repérer la littérature. Cette méthode suggère que la machine (système d’information informatisé) doit être capable de localiser les informations demandées, sans nécessiter une structuration particulière préalable de l’information sous forme de mots-clés ou de résumés. Ceci implique que la machine effectuera la recherche sur le texte intégral pour retrouver les informations sollicitées.

Mais les limites technologiques durant les décennies 60, 70, 80 ont entravé le développement de cette méthode ce qui permit l’épanouissement des systèmes de recherche d’information qui exigent une structuration préalable de l’information sous forme de données bibliographiques.

Mais, l’offre des bases de données bibliographique sera concurrencée, à partir de 1990, par le texte intégral qui devient la production majeure. Le phénomène s’est amplifié au milieu des années 90 avec l’avènement de World Wide Web et avec les améliorations apportées aux systèmes de recherche d’information sur le texte intégral. Ceci mit ainsi en cause l’utilité des bases de données bibliographiques pour rechercher l’information.

En plus, l’essor d’Internet a bouleversé les modèles de distribution des bases de données bibliographiques. Les organismes publics aux Etats-Unis tels que la bibliothèque nationale de médecine (NLM), l’Institute for Operations Research and the Management Sciences et l’Office of Scientific and Technical Information,(OSTI) ont commencé à diffuser leurs bases de données bibliographiques gratuitement sur Internet

Or, les coûts de production d’une base de données sont assez élevés. Les producteurs privés des bases de données bibliographiques se sont, donc, retrouvés devant un manque à gagner. Les producteurs publics sont conscients du rôle que joue l’Etat dans le financement des lourds dispositifs producteurs de bases de données bibliographiques.

Certains producteurs privés ne pouvaient plus donc, assurer leur survie d’autant plus, que le mouvement de concentration entre acteurs du marché numérique menace les petites sociétés productrices des bases de données bibliographiques. C’est le cas de plusieurs éditeurs et intermédiaires qui ont acquis ces dernières années de nombreux producteurs et distributeurs des BDD bibliographiques. On cite à titre d’exemple, Thomson Publishing (qui a acheté durant les dix dernières années ISI, Gale Group, Information Access Company,) et Cambridge Scientific Abstracts qui a mené dans les cinq dernières années plusieurs acquisitions de bases de données bibliographiques telles que Sociological Abstracts , Aqualine, Pysical Education Index, ABC POL SCI, Art Bibliographies Moderns, Political Science Abstracts, et Bowker, le producteur de plusieurs bases de données bibliographiques dont LISA spécialisée dans le domaine des sciences de l’information.

Qu’ont-ils, donc, fait les producteurs de bases de données bibliographiques pour faire faces aux nouveaux défis ? Quelle stratégie d’offre ont-ils adoptée ? Et quelle valeur ajoutée peuvent-ils apporter au marché d’offre d’information numérique ?

En vue de répondre à ces questions, nous avons examiné la stratégie d’offre de certains producteurs de bases de données bibliographiques. Et afin d’approfondir notre raisonnement, nous avons effectué un certain nombre d’entretiens avec plusieurs responsables de sociétés productrices de bases de données bibliographiques. Les résultats, sont complétés par un travail de recueil de données, mises à jour fréquemment, sur les différentes offres proposées par ces producteurs.

Les producteurs sont sélectionnés d’une façon à montrer la variété des statuts des producteurs, (publique : NLM, INIST, privé : ISI, CSA, société savante : BIOSIS, INSPEC, CAS), du poids financier de la société productrice (sociétés de grande taille : ISI, CAS, NLM, CSA, sociétés de petite taille : INSPEEC, BIOSIS) et de domaine scientifique des bases de données

produites (scientifique, technique et médical  : ISI , INIST, NLM, BIOSIS, INSPEC, sciences humaines et sociales : ISI, INIST, CSA). Nous avons classé ces producteurs selon le type des

bases de données qu’ils produisent à savoir :

  • Producteurs de bases de données multidisciplinaires (ISI, INIST)
  • Producteurs de bases de données spécialisées (chimie : CAS, physique : INSPEC, biologie :BIOSIS, médicine : NLM, sciences humaines et sociales : CSA)