2.La politesse linguistique

La politesse est un phénomène linguistiquement pertinent, dont les chercheurs ont pris conscience au milieu des années 70, la première ayant ouvert ce domaine de réflexion étant Robin Lakoff, suivie de Leech, et surtout Brown et Levinson, transformant la politesse linguistique en véritable champ théorique. Il devient donc évident qu’il est

‘impossible de décrire efficacement ce qui se passe dans les échanges communicatifs sans tenir compte de certains principes de politesse, dans la mesure où de tels principes exercent des pressions très fortes – au même titre que les règles plus spécifiquement linguistiques (Kerbrat-Orecchioni, 1992 : 159-160).’

L’objectif des chercheurs inscrits dans ce champ théorique est d’essayer de construire un modèle général de la politesse (un système unifié de règles), et de décrire de façon minutieuse le fonctionnement de ces règles dans un grand nombre d’interactions attestées dans les différentes sociétés.

Le Petit Robert (1996) définit le mot « politesse » de la façon suivante :

‘Ensemble de règles qui régissent le comportement, le langage considérés comme les meilleurs dans une société ; le fait et la manière d’observer ces usages.’

Nous nous intéresserons, pour notre étude, uniquement à la politesse linguistique, « celle qui s’inscrit et s’incarne dans des productions discursives » (Kerbrat-Orecchioni, 1992 : 162), politesse définie par Lakoff (1989 : 102) «  as a means of minimizing the risk of confrontation in discourse (…) ; politeness strategies are designed specifically for the facilitation of interaction ». La politesse gère les comportements que tout locuteur est censé observer envers son ou ses partenaire(s) d’interaction, mais aussi envers lui-même. Elle exerce donc un certain « pouvoir » sur le déroulement de l’interaction, c’est pourquoi nous en tiendrons compte dans l’analyse des interactions de nos corpus, principalement lors de l’analyse de la formulation de l’acte de requête, acte engageant les « faces » de chacun des partenaires de l’interaction et pouvant mettre à mal la relation interpersonnelle liant les interactants. En effet, au cours de l’interaction, les énoncés, certains plus que d’autres, possèdent une valeur relationnelle, en plus d’un contenu informationnel. La quête d’un consensus, le souci de ménager les faces d’autrui, le désir d’avoir raison, etc. font partie de ces énoncés, et ont un rôle dans la séquence de requête.

Nous présenterons ici une synthèse des différents modèles de politesse présentés par Kerbrat-Orecchioni (1992 : 159-191). Concernant les manifestations linguistiques de la politesse dans les interactions, nous verrons en détail ces différents procédés linguistiques lors de notre analyse de l’acte de requête dans notre quatrième partie.