4.1.Le statut

Le statut désigne

‘la position objective occupée en fonction du niveau social ; il englobe un ensemble de caractéristiques objectives qui déterminent la place d’un individu sur une échelle sociale (Fischer, 1997, in Cazals-Ferré et Rossi, 1998 : 30). ’

Précisément, les statuts sont

‘Des ensembles d’attributs et d’attitudes, de qualités ou de caractères, qui peuvent être imposés ou assignés (ascription), acquis ou conquis (achievement), selon qu’ils sont liés à un « destin social » (exemple : position dans un espace familial) ou enjeux d’un « projet social » (exemple : poste dans une hiérarchie professionnelle). Les statuts ne sont pas seulement des étiquettes assignées à l’acteur, qu’il reprendrait à son compte par intériorisation : ce sont aussi des ressources utilisées par l’acteur dans l’exercice de ses rôles, dont il se sert pour maintenir une place qui lui est accessible dans le monde social, et des sanctions accordées par ses partenaires et ses contemporains pour la façon dont il s’acquitte de ses rôles, dans un mixte de conformité et d’innovation, de reproduction et de distinction (Cefaï, 1998 : 233). ’

Il s’agit de l’état, du rang social de chaque individu, et des dispositions fixant notamment les droits et devoirs d’une profession (ou d’un autre type de statut). Par exemple, être père est un statut, et celui-ci implique une autorité sur l’enfant et un droit de protection (les rôles). Nous pouvons distinguer deux types de statuts, les statuts assignés et les statuts acquis. Les statuts assignés le sont en général dès la naissance, ils ne sont donc pas choisis par le sujet. C’est le cas notamment du sexe biologique. Les statuts acquis sont au contraire issus d’un choix de la part de l’individu, de ses initiatives ou encore de son travail. Il s’agit notamment du statut lié à une profession, du statut familial, etc. Une même personne peut donc posséder plusieurs statuts, c’est ce que nous verrons avec nos secrétaires qui sont à la fois femme, secrétaire, épouse. Toutefois, le statut de secrétaire (ou de commerçant dans les interactions de commerce de façon générale) peut être plus ou moins stabilisé socialement, si elle est reconnue comme telle en dehors de l’interaction commerciale. Par contre, le statut de client ne s’actualise que dans l’activité de commerce. Le statut de secrétaire (ou plus précisément les composantes pertinentes de son statut dans l’interaction) est plus complexe que celui de client. Elle est en effet la personne qui détient les informations et d’une certaine façon le bien désiré par le client puisqu’elle est souvent son unique lien avec l’entreprise et qu’elle représente l’entreprise. De plus, la secrétaire est socialement et légalement reconnue comme telle, elle possède le droit de revêtir le rôle consistant en la vente de biens et de services et la transmission d’informations.

Il faut préciser ici qu’il y a un lien de dépendance entre les statuts acquis et les statuts assignés, puisque, par exemple, il sera plus facile pour un homme d’accéder au statut de cadre supérieur. Nous pouvons nous demander s’il sera alors plus facile pour une femme d’accéder au statut de secrétaire. D’après Messant-Laurent, ce n’est pas un hasard si les femmes sont nombreuses dans les bureaux. Pour elle, l’existence et la permanence des secrétaires autour des patrons ne s’expliquent pas seulement par des raisons économiques et sociales, mais aussi par le fait que

‘Ceux qui décident – une minorité d’hommes – ceux qui contrôlent, ceux qui ont la parole se réservent l’accès privilégié aux femmes, à la possibilité de rencontrer des femmes, sur leur lieu de travail. Autrement dit, les cadres supérieurs – ceux qui ont un mot à dire sur l’organisation de l’entreprise – apprécient et s’assurent la présence sur le lieu de travail d’une femme « en particulier », leur secrétaire («  private secretary  ») (1990 : 187).’

Pour finir, le(s) statut(s) de chaque individu lui permet(tent) d’anticiper sur les comportements des autres individus avec lesquels il entre en interaction. En effet, au statut d’un individu sont associés des pratiques, des manières de faire, des rôles, qui induisent des attentes vis à vis de l’autre.

‘Chacun à la suite d’une action attend en réponse un certain comportement d’autrui. Chacun aussi en fonction de sa position attend des attitudes, des actions d’autrui et, en miroir, autrui attend du sujet, du fait de sa position, des attitudes et des actions (Chappuis et Thomas, 1995 : 3).’