2.1.Aspects sémantiques et rhétoriques

Concernant les aspects sémantiques, des études ont porté sur les différences se situant d’une part au niveau du vocabulaire, d’autre part, au niveau du choix des thèmes. A propos du vocabulaire, Lakoff ainsi que d’autres chercheurs ont observé que les seules différences repérables portaient sur l’utilisation des termes de couleur, dont, nous l’avons dit plus haut, la palette est plus restreinte chez les hommes. Concernant le choix des thèmes, il est évident que les femmes et les hommes ne parlent pas des mêmes choses. Ainsi, les hommes ont beaucoup moins de facilités que les femmes à parler de questions « intimes ». Lakoff l’a d’ailleurs remarqué (1975 : 82-83), la parole féminine est person-oriented alors que la parole masculine est plutôt object-oriented.

Concernant les aspects stylistiques et rhétoriques, Lakoff avait signalé la production par les femmes de nombreux évaluatifs positifs, auxquels elles ont tendance à donner en plus une forme superlative (lovely, I love it, etc.). Mis à part ces caractéristiques, les diverses études ont aussi montré que

  • « le parler féminin est émotionnel, et réciproquement, la parole émotionnelle est plus ou moins le monopole des femmes » (Kerbrat-Orecchioni, à paraître : 8). Elles sont donc plus « douées » que les hommes pour exprimer et interpréter les manifestations émotionnelles. De plus, ces manifestations ont une fonction de solidarité emphatique.
  • Les femmes ont une préférence pour un niveau de langue « correct », voire « hypercorrect ». En effet, comme Labov a pu le souligner, les femmes surveillent leur langage, évitent les jurons, etc. Ces caractéristiques connaissent diverses interprétations. Cette préférence pour un niveau de langue « correct » peut être interprétée comme un moyen pour la femme de se revaloriser, face au sentiment d’infériorité intériorisé par la plupart des femmes (voir Trudgill, 1972 et 1998). Mais elle peut aussi s’expliquer par les activités professionnelles de la femme. En effet, la femme est très présente dans le secteur tertiaire, où les activités sont des activités les mettant en contact avec le public. Dans ce cas là, le niveau de langue plus élevé tient non seulement au sexe, mais aussi au rôle (voire plus au rôle qu’au sexe), encore qu’il semble que le registre des clientes soit plus relevé que celui des clients. Nous verrons comment cela se passe dans nos interactions dans le prochain chapitre. Mais nous allons étudier maintenant les différences entre femmes et hommes se situant au niveau pragmatique, précisément au niveau des actes de langage et de la politesse.