2.3.Aspects conversationnels

Parmi les différents aspects conversationnels, certains ont attiré plus particulièrement l’attention des chercheurs, comme la quantité de parole ou les interruptions.

Concernant la quantité de parole, les diverses analyses de corpus (voir Aebischer, 1985, 1992) ont montré que la femme décrite comme très bavarde était une caricature. Tout dépend en fait de certains éléments comme le statut du locuteur/ de la locutrice, de son tempérament (on peut être plus ou moins bavard ou taciturne), mais aussi du type de situation discursive. En effet, d’après certaines études, les hommes parlent plus facilement et plus longtemps en situation institutionnelle (voir Holmes, 1992). Si les hommes « dominent » lors d’interactions comportant de longues interventions, les femmes quant à elles se retrouvent à égalité avec eux dans les échanges de « mêlée générale », c’est-à-dire constitués d’interventions courtes.

Les études qui ont porté sur les interruptions sont nombreuses, et ont abouti à des résultats très divers, voire opposés. Nous en parlerons de façon plus précise dans un développement qui leur sera consacré (4.3.Chevauchements de parole), mais nous pouvons dresser ici un premier bilan de ce qui a été déjà publié en la matière. Les interruptions ont été l’objet de nombreuses études dont la célèbre étude de Zimmerman et West (1975) qui a porté sur un corpus constitué d’une trentaine de conversations, enregistrées dans un campus universitaire américain. Leurs résultats montrent que les hommes sont le plus souvent responsables des interruptions dans les dyades mixtes, résultats confirmés par d’autres analyses (West et Zimmerman, 1985, West, 1992). Pourtant, certaines études ont ensuite abouti à des résultats différents, voire inverses, notamment en prenant en compte d’autres éléments du contexte, qui n’auraient pas été pris en compte lors de l’analyse de Zimmerman et West, tels que la valeur fonctionnelle de l’interruption (voir Talbot, 1992), le statut de la personne qui parle (d’après Beattie, 1983, le comportement interruptif dépend plus du statut que du sexe).

‘Aucune conclusion sérieuse n’est possible sur cette question si l’on ne prend pas la peine de regarder de très près qui interrompt qui, dans quelle situation, de quelle manière, avec quelle intention et quels effets… (Kerbrat-Orecchioni, à paraître : 15).’

Nous verrons donc lors de l’analyse des interruptions dans les interactions de nos corpus que les interruptions posent des problèmes descriptifs et interprétatifs, d’autant plus que sont liées au phénomène de l’interruption les questions de la « dominance » et du « pouvoir »…