2.Les stratégies identitaires

Une stratégie peut se définir, selon la définition du Petit Robert, comme étant un « ensemble d’actions coordonnées, de manœuvres en vue d’une victoire ». Les stratégies identitaires, selon un certain consensus, sont

‘des procédures mises en œuvre (de façon consciente ou inconsciente) par un acteur (individuel ou collectif) pour atteindre une, ou des, finalités (définies explicitement ou se situant au niveau de l’inconscient), procédures élaborées en fonction de la situation d’interaction, c’est-à-dire en fonction des différentes déterminations (socio-historiques, culturelles, psychologiques) de cette situation. (Camilleri et al, 1990 : 24).’

Ainsi, mettre à jour les stratégies identitaires des locuteurs, c’est voir quelles finalités les acteurs poursuivent quand ils mettent en cause leur stratégie identitaire actuelle, quels comportements individuels ou collectifs sont mis en place pour atteindre ces victoires sur un adversaire (soi-même, les autres, le système social). Ces finalités se négocient, se renégocient au cours de l’interaction. Et l’un des enjeux de l’interaction, pour le locuteur, est d’être reconnu. En effet, ‘«’ ‘ une part importante des échanges est faite des stratégies par lesquelles s’expriment la demande de reconnaissance et la négociation de la définition des places respectives ’ ‘»’ (ibid. : 175). C’est une des motivations essentielles de la communication et des interactions, et ce, même dans les interactions professionnelles.

D’une part, la secrétaire n’est pas seulement une secrétaire, dans le sens où, en plus des rôles strictement professionnels qu’elle doit remplir, elle est avant tout un individu, en relation avec d’autres individus (patron, employés, clients…) dans le cadre de son travail. Elle espère faire reconnaître ses compétences, ses capacités, son efficacité : pour elle-même, car elle a besoin de valorisation, et pour l’entreprise (en reconnaissant les compétences de la secrétaire, le client reconnaît aussi les compétences de l’entreprise). La secrétaire, comme tout(e) autre employé(e), préfère être considérée comme une personne essentielle à l’entreprise, nécessaire, ce qui la pousse parfois à percevoir les relations interpersonnelles comme des rapports de force, où elle peut être mise en infériorité. Elle va alors développer des stratégies identitaires afin de protéger ses faces. D’autre part, le client espère aussi de son côté être reconnu dans son identité propre, se sentir exister aux yeux de la secrétaire (elle est son premier et parfois seul contact avec l’entreprise), et de l’entreprise (il souhaite ne pas être un inconnu). Il développera des stratégies afin que sa requête ne soit pas banalisée, mais au contraire qu’elle soit traitée de façon personnelle. Il y a, dans cette recherche de reconnaissance, un désir de séduction de la part des deux participants à l’interaction, c’est-à-dire ici, la secrétaire et le client. Nous allons en voir quelques exemples.