5-2-5-3- Une logique fractale dans les trois grandes notions lacaniennes

Je m’appuierai ici sur les définitions apportées dans Le dictionnaire de la psychanalyse (1993) concernant les trois ordres de réalité lacanien marquant la pierre de touche de sa théorisation.

La notion de cercles concentriques reliés les uns aux autres, a l’instar d’une spirale, se retrouve dans cette théorie. Le Réel, l’Imaginaire et le Symbolique ne peuvent en effet exister que dans une corrélation telle que l’absence d’un de ces ordres a pour conséquence la disparition des deux autres. La notion de nœud borroméen s’en est faite métaphore. Toutefois, ces trois ordres jouent à mon sens dans un écart, plus ou moins grand selon les psychopathologies en présence, entre les pôles iso et homomorphiques. Si tout est lié, l’écrasement des représentations et affects se rapproche du fonctionnement le plus psychotique, dans le cas contraire, le fonctionnement est plus névrotique.

En l’occurrence, ces trois ordres admettent dans leurs liens de nombreux points de tension : le Symbolique expulse par exemple le réel en tant que celui-ci n’appartient pas aux « représentation du monde ». Toutefois ce Réel, expulsé du symbolique et revenant malgré tout dans l’appareil psychique, fût-ce sous forme d’hallucination, a partie liée avec les deux autres registres en tant qu’il représente un point de butée, un retour par exemple de la castration forclose dans la psychose. En cela, malgré les variables additionnelles, il présente une constante.

Il en va de même pour le registre imaginaire, marqué pour J. Lacan par le leurre et l’aliénation. Si le Symbolique préexiste au sujet, le dépasse, l’Imaginaire est ce moi qui, pour Lacan, est leurrant dans la mesure où il renvoie à une succession d’images de soi jouant sur des identifications multiples mises en abîme. C’est dans ce registre que les variables sont les plus nombreuses. Néanmoins, de par l’intrication existante, il y subsiste toujours une constante : celle du Symbolique, apportant un maillage interne dans lequel demeure une préexistence du sujet au travers de son inscription dans une famille, une parentalité, une fratrie, un patronyme.

Si ces notions peuvent être discutables en ce qui concerne par exemple le traitement fait au moi et à la fragilité des identifications, elles me semblent néanmoins importantes et utiles en ce qui concerne l’ordre du Réel et le registre du Symbolique. Sur le Réel par exemple, son éviction du Symbolique, son retour sous forme hallucinatoire, psychosomatique ou corporelle est à prendre en considération également dans les traces graphiques. Quant au Symbolique, sa préexistence au sujet est centrale dans un procès de fractalisation du fonctionnement psychique puisque, en inaugurant la position de P. Aulagnier que nous allons pointer et travailler à présent, elle indique comment les structures fractales dans le domaine psychologique comprennent aussi la dimension intersubjective. En outre, leur degré d’intrication exclut également en clinique toute dimensionnalité à chiffres entiers. Nous sommes encore là dans des zones fractionnaires.