Après ces démonstrations, retour sur l’intérêt de cette recherche sur la structure fractale de l’appareil psychique

Il s’agit au fond ici de chercher des éléments qui puissent souligner combien dans chaque nouvelle expérience demeurent des résidus, des précipités de l’expérience antérieure. Ainsi la possibilité de travail psychique est-elle infinie. Néanmoins, reste insoluble une question précise : quelles sont les forces intersystémiques en présence ? Celles-ci se jouent-elles uniquement sur la scène intrapsychique ou bien aussi sur la scène intersubjective ? Avec quel poids pour chacune ? Nous avons vu au point de vue topique que la dimension fractale n’incluait pas seulement les instances intrapsychique mais aussi les rapports intersubjectifs. Nous avons vu sur le plan dynamique que des motions pulsionnelles ainsi que des représentants-représentations et des affects pouvaient passer d’une instance à l’autre en fonction de rapports conflictuels particuliers. Nous avons vu au point de vue économique que des quantités d’énergie pouvaient voyager d’un système à l’autre mais là encore l’intrication, l’opposition, la combinaison des forces entre elles ne me semblent pas dépendre d’une conceptualisation basée sur la régularité.

Dans cet espace, régulier dans son irrégularité, pris dans l’appareil psychique, comment se jouent ces rapports entre facteurs économiques, quantitatifs, et facteurs dynamiques, conflictuels ?

Ma deuxième hypothèse prolonge sur ce point la première : si nous sommes parties de la démonstration d’une fractalisation de l’objet métapsychologique, ce fut pour montrer les ramifications multiples qui, à toutes échelles, se retrouvent avec un poids nouveau à chaque fois, une densité nouvelle. Toutefois comment s’opère cette densité ? Dans quel sens va-t-elle ?

Toujours du plus grand au plus petit, autrement dit en matière psychique du plus originaire au plus symbolique ?

Partons du point de vue métapsychologique développé par S. Freud : l’appareil psychique est tout entier régi par des contenus internes de poids, de densité et d’intensité variables. Tous ces contenus sont en interaction les uns avec les autres. Chacun se mélange à d’autres et exerce en son sein, selon sa masse propre, une force de gravité sur l’autre ou les autres.

D’où notre hypothèse : les noyaux traumatiques sont plus lourds que les autres contenus et exercent ainsi une importante force de gravité sur des représentations et affects plus légers. Ceci n’exclut pas la loi de correspondance évoquée par B. Chouvier mais vu que tous les contenus ne sont pas directement mobilisables, certains étant clivés, d’autres projetés, d’autres déniés, une complexité supplémentaire s’y articule.

Le pas de plus consisterait à nous rapprocher d’une explication sur les dominances souvent constatées d’une constellation psychique à une autre. Chez les psychotiques, les lois associatives par les mots sont très compliquées, le mot a un poids, il est équivalent aux choses, la liaison par contiguïté prime sur la liaison par continuité. Dans certaines structures psychiques régressées ou peu élaborée, l’ambiguïté prime sur le clivage, dans d’autres le clivage sur l’ambivalence. Cela ne se passerait pas seulement par fixation mais par attirance de ces forces qui garderaient des forces d’attraction plus ou moins importantes sur d’autres éléments plus élaborés.

De façon générale les forces originelles (pulsions d’attachement, pulsions violentes, etc.) seraient plus denses que des forces plus secondarisées (forces de liaisons).