La création des enveloppes psychiques : une dimension fractale pour les contenus les plus archaïques qui les constituent.

Sans le concept d’attracteur, la psyché reste prisonnière du tout premier niveau de développement de l’enveloppe psychique nommé par D. Houzel la « pellicule ». Ici les perspectives sont écrasées et le dedans-dehors n’existe pas encore, tout ce qui rentre par la droite est susceptible de sortir par la gauche, idem pour le bas et le haut. En revanche, dés l’instant où une membrane se constitue, une première relation entre l’intérieur et l’extérieur se fait jour. Toutefois la membrane, issue de la phase symbiotique développée par M. Malher, traite déjà les pulsions sur un mode directionnel : celles-ci étant sujettes à la force de certains attracteurs, se dirigeraient vers l’objet dés la formation de la pellicule, première période de développement de l’enveloppe psychique. D. Houzel appelle cela « systèmes tubulaires » : chacun d’entre eux oriente les pulsions vers autant d’objets partiels.

La constitution de la membrane permettrait donc en second lieu de « réunir les systèmes tubulaires en un unique contenant » (p 43). Ce modèle, qui fait de la première phase de création de l’enveloppe psychique un système déjà pris dans les forces d’attraction de certains attracteurs, me semble être plus en adéquation avec la notion de fractalisation. En effet, c’est en admettant un embryon d’existence de cette tendance que nous pouvons comprendre comment plus tard celle-ci peut ensuite se développer. Car c’est précisément parce qu’à chaque niveau existent et subsistent des traces psychiques ( de l’événement à venir autant que de l’événement survenu) qu’une construction devient possible.

Dans cette logique concentrique, D. Houzel rajoute la notion « d’habitat ». Elle dépasse la théorie des champs et des forces pour entrer dans celle de construction. D. Houzel en fait quelque chose de similaire aux processus secondaires : « je définis l’habitat comme un feuillet de l’enveloppe psychique construit méthodiquement à partir d’un matériau perceptif et moteur, selon les repères temporels et spatiaux de notre monde euclidien, en un agencement cohérent et stable, dont la texture et la forme sont précisément liées à ces qualités de stabilité et de cohérence » (p 44). L’habitat est similaire au cadre dans la cure analytique et circoncit ainsi le sujet dans des règles de fonctionnement très précises. Est-ce à dire que la théorie des catastrophes perd sa priorité ?

En définitive, dans un modèle en trois temps assez proche de celui de P. Aulagnier (1975), ce modèle en trois feuillet propose un habitat englobant une membrane, elle-même englobant à son tour une pellicule beaucoup plus fine.

Mais, afin de ne pas céder à la facilité, revenons sur l’hypothèse d’enveloppes psychiques fractalisées. Nous avons précisé précédemment que la théorie des fractals, lorsqu’elle pénètre l’univers psychique, ne peut se concevoir uniquement sous l’angle d’une seule structure mais d’au moins deux structures en présence selon l’image du sablier qui peut alors servir de support illustratif. Cependant D. Houzel inclut dans la structure des enveloppes la notion de compacité qu’il rend incompatible, dans son étude théorique différentielle, avec la notion de signifiants développée par J. Lacan.

Pour D. Houzel, une enveloppe psychique ne peut être compacte que si son espace peut se mesurer en terme de quantité finie. Or cela reviendrait à donner une dimension unique à une notion beaucoup plus fractionnée à mon sens. En outre, comme je l’ai souligné plus haut, la théorie lacanienne fait des réseaux de signifiants des précurseurs à la venue même de l’enfant, des objets supports nécessaires à alimenter le sujet au point bas du sablier. Là-dessus, bien sûr l’attracteur gravitationnel, (familial, environnemental) ne représentera qu’un point de départ qui se complexifiera par la suite. Ces données de base nous sont bien utiles. D. Houzel ne les délaisse d’ailleurs pas puisqu’il les reprend, certes dans une autre théorisation par le biais du concept de relation contenant/ contenu développé par W. R. Bion.

En cela ces différentes approches, bien que présentant certaines invraisemblances dans le système lacanien, notamment en ce qui concerne l’aliénation fondamentale et continue du moi dans le registre de l’imaginaire, peuvent s’avérer complémentaires au vu du principe d’incomplétude abordé plus haut.