Deuxième exemple 3 : Dépression sous-jacente

1- Dans un défaut d’idéal du moi, lorsque madame C ne se sent pas à la hauteur, ou lorsqu’elle pense que son fils n’est pas dans un lieu de vie correspondant à ses attentes à elle, la dépression n’est jamais loin. Je l’écrit en annexes : elle m’a par exemple dit qu’elle déprimerait si elle devait vivre dans le foyer de son fils. Cette dépression sous-jacente est bien entendu le pendant du rapport soumission-domination ci-dessus présenté. Grégoire n’a pas été épargné par cette composante.

2- Cependant sa dépression à lui ne passe pas par la belle image de lui-même, le choix des bons mots et de la bonne tenue vestimentaire. Pour Grégoire, la dimension intra passe en général par une apathie, constatée fréquemment en ces périodes, et un débit verbal lent. Comme chez la mère, cela est pour une part contrecarré par un port rigide. Grégoire marche avec le tronc redressé et la tête très droite. Mais quand Grégoire va mal, et ce pour des raisons précises sur lesquelles nous reviendrons, alors sa dépression passe par des phases proches du démantèlement, avec focalisation sur un seul point de l’espace (rassemblement de l’appareil sensoriel pour éviter le démantèlement) en guise de mesure de protection. Nous reviendrons sur cet aspect au chapitre concernant le retour des agonie primitives.

3- Dans l’atelier, lorsque ce genre de dépression survient, Grégoire ne trace généralement pas, il est en suspend. Si d’aventure il trace, la première manœuvre défensive pour s’en départir passe par la constitution d’un fond à l’aide d’un gros pinceau trempé dans de la peinture. La seconde est l’appui sur cet objet interne aliénant et protecteur que constitue le père. Cependant, il faut reconnaître que lorsque cette dépression psychotique survient, cet objet pare-excitant ne résiste pas longtemps à sa violence et se détruit très vite. Grégoire parle alors de la voiture cassée de son père, son père l’a détruite, ce qui laisse supposer qu’une partie de lui-même a bien été détruite et n’est pas prête d’être réparée. Par ailleurs, dans ces moments, Grégoire peut dire également que son père est fou. Je fais remarquer au passage qu’il suit en cela le clivage de l’objet ou dédoublement des imagos (J Bergeret, 1972) 21 en prenant à la fois pour cible et pour étayage cet objet paternel.

Notes
21.

J Bergeret, Psychologie pathologique. Masson. Paris. 1972