7-1-2 Courants d’affiliation et grands thèmes abordés

Je me référerais ici à l’ouvrage édité aux éditions Terre des Arts et écrit pour la préface par Jean-Louis Amar et pour le texte par Philippe Cusin.

Saint-Geniès reprend les symboles et grands mythes bibliques (Lost Paradise, La Vénus de Botticelli), la mythologie Grecque (Narcisse, Centaure et Lapithes, etc.), des mythes issus de la littérature espagnole (plusieurs peintures et esquisses sur Don Quichotte) ou encore il met en scène des tableaux retravaillés issus de peintres maniéristes, baroques (utilisation du contraposto), néo-classiques (femmes nues), renaissants, surréalistes, expressionnistes.

Utilisant ainsi des courants picturaux reconnus, le peintre n’en est pas enfermé pour autant dans l’un d’entre eux et se plaît à nommer son style « figuratif irréaliste ». La plupart du temps sa technique est la suivante : il pose un motif, s’y identifie et invente une histoire, un scénario fantasmatique qu’il tente de faire rentrer dans les limites du cadre support. De façon générale, Saint-Geniès utilise sept grands thèmes principaux revenant tour à tour ou de façon mêlée dans chacun de ses tableaux. Ces thèmes s’entremêlent en effet dans des proportions différentes à chaque fois. P. Cusin, en accord avec le peintre, les a respectivement distingués de la façon suivante : mouvement ; mythologie ; corps de pierre ; amour absolu ; femmes éternelles ; musique ; déchéance et ses figures.

  • Dans le thème du mouvement, des chevaux sont souvent représentés, ils sont le véhicule de luttes, guerres, rapts. Une dominante expressionniste ressort ici de façon privilégiée. La violence des pulsions s’exprime alors dans toute sa force ; que la lutte soit réussie ou échouée, les passions sont alors prédominantes. Le registre temporel s’inscrit ainsi dans un développement rythmique, invitation à laquelle le spectateur ne peut se départir. Tout se joue dans une fureur de vivre avec élévation et déchéance associées mais toujours avec cette rage d’aller de l’avant quoi qu’il en coûte. Car l’inéluctable est déjà là : soit le drame est déjà présent dans le message implicite du tableau, soit les motifs s’en font annonciateurs.
  • Dans le thème mythologique, les mythèmes peints nous renvoient à un intemporel, époque originelle parfois (mythe du Paradis Perdu, d’Adam et Eve, de Tristan et Iseult, etc.) quelles que soient les cultures, croyances et religions, une forme de « contrainte à symboliser » (R. Roussillon, 1998) revient toujours sur un temps originaire.
  • Le thème surréaliste est certainement dominant dans son œuvre. Il nous renvoie aux limites de l’humain, de l’animal, du minéral (corps de pierre). Sur ce point, personnages et pierre sont mêlés.
  • Le thème de « l’amour absolu » est servi par des corps à corps hétéro ou homosexuels (femmes ensembles) s’étreignant avec force et passion. P. Cusin écrit qu’il s’agirait ici de défier le temps qui passe par la puissance de l’amour.
  • Le thème de la « femme éternelle » place sur le devant de la scène des femmes sujettes aux natures multiples, aux natures mystérieuses ; une association avec les éléments surréalistes les font devenir mi femme/ mi sirène, mi-femme / mi-navire.
  • Le thème de la musique met souvent en scène des femmes jouant d’un instrument, se confondant même parfois avec. Sur ce point, Saint-Geniès, arrière-petit-fils de musicien et fils d’un amateur, avoue travailler lui-même en musique.
  • Enfin, le thème de la « déchéance et ses figures » donne à voir la dégradation opérée par le temps et s’inscrit dans des courants de pensée expressionnistes dans le fond bien que la forme demeure souvent surréaliste. L’homme court à sa perte, les chevaliers perdus, désorientés, sont légions.

L’ensemble de cette peinture adopte des tons de couleurs sombres, tons de glaise, bleus nuit, seules les couleurs chaires relèvent ces tableaux (tous les personnages représentés sont nus). Enfin, une grande majorité de femmes sont représentées dans ses tableaux (de l’ordre de 85 % environ).