Le paradigme du traffic around towns renvoie d’une part aux nouveaux schémas de mobilité, qui s’affirment dans les agglomérations par une nette augmentation de la part des déplacements de périphérie à périphérie, et d’autre part à l’organisation du réseau routier qui supporte l’essentiel des déplacements mécanisés et détermine leur itinéraire. Sur ce dernier point, on a vu que le réseau rapide urbain était principalement radial. Cette architecture n’est pas sans poser de sérieux problèmes, au premier rang desquels le fait d’organiser la convergence vers le secteur le plus densément urbanisé de l’agglomération de flux qui n’ont rien à y faire. Il peut s’agir autant de trafics internes à l’agglomération que de trafics externes dits de transit (figure 42). Outre le fait qu’ils justifiaient et dynamisaient la construction d’infrastructures routières, on a un temps pensé – le tunnel sous Fourvière est encore là pour nous le rappeler – que, de toute façon, ces flux ne pouvaient qu’être bénéfiques pour les espaces traversés.
Source : DDE du Rhône
A vrai dire, il faut admettre qu’une certaine ambivalence subsiste encore aujourd'hui dans l’attitude à adopter à l’égard du transit. En effet, « ces flux (…), tant pour les personnes que pour les marchandises, sont un handicap pour Lyon (image très négative des bouchons, nuisances...), mais ils peuvent aussi constituer un atout en raison de l’importance quantitative des trafics concernés, si Lyon sait en saisir l’opportunité, pour le tourisme, l’image internationale et l’activité économique de la région (distribution, logistique...). » 637 Seulement, la façon d’en tirer directement avantage demeure une énigme. On ne sait pas comment rendre bénéfiques des flux qui répugnent à quitter leur voie d’accueil et finalement « aucun projet de développement d’envergure, si on excepte le trop fâcheusement célèbre tunnel de Fourvière, n’a jamais été proposé pour tirer profit de ce flux de millions de voyageurs et de tonnes de marchandises dont l’origine est à la fois régionale, nationale et internationale. » 638
Type de véhicules | M.J.A. | dont % par Fourvière |
dont % par Contournement Est | |
Véhicules légers | 20.100 | soit 74% | 55 | 45 |
Poids Lourds | 6.800 | soit 26% | 72 | 28 |
Source : DDE du Rhône
Les politiques locales se sont donc progressivement orientées vers des solutions consistant à séparer les différents types de trafic et à les répartir sur des axes correspondant à leur nature et au rapport qu’ils entretiennent avec l’espace traversé. Pour le transit, il s’agit de le rejeter à l’extérieur de l’agglomération. Soucieux d’assurer la fluidité de ces flux et devant l’impasse des précédentes solutions, l’État commence alors à organiser des contournements et trouve en cela un soutien auprès d’un Département désireux d’améliorer les conditions de circulation sur son territoire grâce au renforcement du maillage routier. Cette convergence d’intérêt a fait naître un contournement Est qui tient surtout de la rocade, démontrant à quel point ces infrastructures sont « de positionnement délicat : assez loin pour être efficaces, pas trop, de manière à pouvoir servir pour la circulation de la couronne extérieure ce qui permet une meilleure rentabilité. » 639 Considérée comme une solution provisoire, cette "première étape" s’est néanmoins avérée beaucoup moins satisfaisante que prévu en matière de détournement du trafic de transit (tableau 17). Ainsi, le report des flux externes les plus massifs, les flux nord-sud, est resté minoritaire, surtout pour les poids lourds. Au total, « au quotidien, 50 000 véhicules en transit, dont 26% de poids lourds, perturbent fortement la vie et la circulation locales » 640 et, même avec des hypothèses de reports modaux très ambitieuses et de délestage important par des itinéraires autoroutiers régionaux alternatifs, les projections de la DDE font état d’une augmentation continue de ce chiffre, et au mieux d’une stabilisation sur l’axe A.6-A.7 au droit de Lyon. Ces déplacements restent majoritairement le fait des voitures particulières et se font selon des distances et des itinéraires relativement variables, ce qui accroît la difficulté de les exclure des voies rapides urbaines.
Mais si l’agglomération lyonnaise est plus que jamais en attente d’un véritable contournement, c’est que, grâce au rôle accru de la Communauté Urbaine et au renouveau de la planification urbaine engagé avec le Schéma Directeur de l’Agglomération Lyonnaise (SDAL), celui-ci s’intègre aujourd'hui dans une stratégie d’agglomération. La volonté de procéder à une requalification du centre 641 et d’éviter la dispersion et l’étalement de l’agglomération nécessite l’exclusion du transit de l’espace central afin de transformer l’axe A.6-A.7 en boulevard urbain. Cette stratégie amène également les autorités locales à se soucier des caractéristiques et des localisations des infrastructures de contournement.
M. BURDEAU, D. ROBERT, op.cit., p.83.
M. BONNEVILLE, 1989, op.cit., p.18.
J. PELLETIER, C. DELFANTE, op.cit., p.173.
DDE, Contournement Ouest de Lyon : dossier pour un débat d’opportunité, Préfecture du Rhône, 1997, p.5.
Voir le chapitre 4 pour le projet de Lyon-Confluence, exemplaire à cet égard.