La première étape de ce travail a consisté à sélectionner les indicateurs les plus pertinents (tableau A1) pour, d’une part, quantifier la motorisation de la population urbaine et, d’autre part, essayer d’expliquer sa distribution dans l’espace :
Ces deux dernières variables occupent une place particulière dans ce travail statistique, dans la mesure où ce sont elles qui approchent au plus près notre idée de territoire de l’automobile. En raison de cette vocation comme de leur nature intrinsèque, fortement évocatrice des structures spatiales, nous les distinguerons dans l’analyse en leur réservant l’appellation de « variable territoriale ».
Ces données statistiques sont fournies par le Recensement Général de la Population, pour les 55 communes de la Communauté Urbaine de Lyon et pour les 85 communes de la Communauté Urbaine de Lille, et par l’office régional de statistique du Bade Wurtemberg, pour les 28 communes du défunt Nachbarschaftsverband de Stuttgart et pour les 179 communes du Verband Region Stuttgart (périmètre qui étend en fait l’étude de la question à l’échelle de la région urbaine).
Intitulé exact de l’indicateur |
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Moto | Nombre moyen de voitures par ménage 2063 | 1999 | 1999 | 1999 | ||||||
Pourcentage de ménages possédant 2 voitures ou plus19991999 n.d.*MotoInd | Nombre de voitures par habitant | 1999 | 1999 | 1999MultMoto | ||||||
NonMoto | Pourcentage de ménages ne possédant aucune voiture | 1999 | 1999 | n.d. | ||||||
Ménage | Nombre moyen de personnes par ménage 2064 | 1999 | 1999 | 1999 | ||||||
Revenu |
Revenu moyen par foyer fiscal Pouvoir d’achat moyen des ménages |
1999 | 1999 |
1999 |
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Densité | Nombre d’habitants au km² | 1999 | 1999 | 1999 | ||||||
Maisons | % de maisons individuelles dans les résidences principales | 1999 | 1999 | n.d. | ||||||
* non disponible |
Un premier examen sommaire, basé sur une cartographie des différents indicateurs de motorisation, semble conforter l’hypothèse d’un lien entre la structure spatiale et la distribution des données relatives à l’équipement automobile.
Pour le Grand Lyon, les images des indicateurs de motorisation reproduisent très nettement la structure radio-concentrique de l’agglomération, tout en dévoilant un déséquilibre entre l’est et l’ouest : en effet, la première couronne orientale présente des caractéristiques proches de celles du centre, alors que les auréoles successives de l’espace périphérique occidental tendent à affirmer des différences plus marquées. Ces deux grands principes de structuration de l’espace lyonnais ressortent évidemment dans la cartographie de nos deux variables spatiales, qui présente de ce fait d’importantes similarités avec les images obtenues pour la motorisation (figure A1). Quant aux deux autres indicateurs (figure A2), ils reprennent chacun à leur compte un de ces deux aspects : la distribution spatiale de la taille des ménages se fait selon une logique essentiellement radio-concentrique, tandis que la variable économique marque de manière très forte le gradient est-ouest.
De la même façon, les représentations spatiales de la motorisation rendent bien compte du caractère multipolaire de l’agglomération lilloise, même si la cartographie de la densité résidentielle tend à agglomérer les trois pôles originels de la conurbation en une tache urbaine centrale continue, faisant d’autant plus ressortir la particularité de l’urbanisation périphérique (figure A3).
Enfin, le fait que la région urbaine de Stuttgart représente un territoire à la fois plus vaste et plus hétérogène ne permet pas de dégager a priori de règles essentielles des différentes cartographies (figure A4). Cependant, il est toujours possible de discerner des images là encore globalement inversées entre la densité de la population et la motorisation, les territoires à plus faible motorisation correspondant généralement aux principaux pôles urbains. Si la perception visuelle de la logique de distribution est ici moins nette que pour les deux précédents exemples, pour lesquels le périmètre d’observation n’excède pas les limites de l’agglomération, la netteté de l’opposition entre motorisation et densité se confirme ensuite à l’échelle de l’ancien périmètre de l’agglomération politique (figure A5).
Les images cartographiques liées aux indicateurs de motorisation se singularisent donc d’emblée par une assez nette tendance à reproduire un certain nombre de grands traits des structures spatiales en présence sur chaque site. Pour appuyer ce premier constat sur des éléments d’observation plus solides et mieux en détailler les implications, nous avons mobilisé différentes méthodes statistiques de régression.
Pour estimer les relations statistiques entre les différents indicateurs retenus, le calcul des coefficients de corrélation de Bravais-Pearson nous permet de détecter la présence ou l’absence d’une relation linéaire entre deux caractères. Les tableaux A2, A3 et A4 en présentent les résultats 2065 .
Moto | MotoInd | NonMoto | BiMoto | Ménage | Revenu | Densité | Maisons | |
Moto | 0,85 | - 0,97 | 0,99 | 0,74 | 0,66 | - 0,77 | 0,92 | |
MotoInd | - 0,86 | 0,83 | 0,30 | 0,72 | - 0,55 | 0,71 | ||
NonMoto | - 0,95 | - 0,70 | - 0,62 | 0,79 | - 0,87 | |||
MultMoto | 0,75 | 0,67 | - 0,74 | 0,93 | ||||
Ménage | 0,25 | - 0,76 | 0,80 | |||||
Revenu | - 0,37 | 0,47 | ||||||
Densité | - 0,76 | |||||||
Maisons |
Pour les communes du Grand Lyon, les indicateurs d’équipement automobile sont très fortement corrélés entre eux, même si, comme on pouvait s’en douter, la motorisation individuelle apparaît légèrement moins dépendante des autres. Ces indicateurs sont également bien corrélées avec les autres variables retenues, même si ces dernières détiennent des parts d’explication variables dans les variations des premiers :
Moto | MotoInd | NonMoto | BiMoto | Ménage | Revenu | Densité | Maisons | |
Moto | 0,91 | - 0,96 | 0,99 | 0,77 | 0,79 | - 0,75 | 0,84 | |
MotoInd | - 0,89 | 0,90 | 0,46 | 0,82 | - 0,62 | 0,70 | ||
NonMoto | - 0,92 | - 0,75 | - 0,68 | 0,77 | - 0,86 | |||
MultMoto | 0,76 | 0,82 | - 0,71 | 0,81 | ||||
Ménage | 0,42 | - 0,70 | 0,81 | |||||
Revenu | - 0,43 | 0,46 | ||||||
Densité | - 0,86 | |||||||
Maisons |
Les résultats des analyses menées sur la Communauté Urbaine de Lille corroborent globalement ces conclusions. On remarquera simplement, dans les pouvoirs explicatifs respectifs, un léger renforcement de l’effet revenu par rapport à l’effet spatial : outre le fait que l’indicateur économique présente des corrélations avec les variables de motorisation sensiblement supérieures à ce qu’on peut observer pour le Grand Lyon, l’influence de la densité de population et surtout de la part des maisons individuelles sur les variations de l’équipement automobile apparaît également légèrement moins discriminante.
Pour Stuttgart, c’est la tendance inverse qui s’affirme : la distribution de la motorisation voit s’estomper considérablement l’effet revenu, pour devenir un phénomène relatif à la taille des ménages et à la structure spatiale ; cette analyse vaut à l’échelle de la région urbaine comme de l’agglomération centrale – qui est représentée par le territoire du défunt Nachbarschaftverband –, même si sur ce périmètre plus restreint, la densité de population devient un facteur explicatif plus déterminant que la taille des ménages.
Moto | MotoInd | Ménage | Revenu | Densité | |
Moto | 0,50 | 0,64 | 0,12 | - 0,54 | |
MotoInd | - 0,32 | 0,24 | - 0,06 | ||
Ménage | - 0,17 | - 0,59 | |||
Revenu | 0,18 | ||||
Densité |
Moto | MotoInd | Ménage | Revenu | Densité | |
Moto | 0,84 | 0,58 | 0,31 | - 0,82 | |
MotoInd | 0,04 | 0,40 | - 0,57 | ||
Ménage | - 0,02 | - 0,65 | |||
Revenu | - 0,32 | ||||
Densité |
On peut alors raisonnablement avancer que deux effets jouent dans la distribution de la motorisation : un effet revenu, mis en évidence depuis longtemps par de nombreuses études, et un effet spatial plus complexe à analyser. Ce dernier semble influer sur l’équipement automobile aussi bien de manière incitative qu’en tant que facteur limitant. Il s’agit en fait d’un effet composite qui intègre le type d’habitat, la forme urbaine globale mais aussi la structure démographique de la population car on remarque que les variables spatiales expliquent souvent d’autant mieux la motorisation que la variable "taille des ménages" le fait également.
Ces deux effets font néanmoins l’objet d’équilibres différents selon les territoires considérés : sur le territoire du Grand Lyon, ils se combinent selon un rapport de force plutôt équilibré ; à Lille, l’effet revenu reste le plus discriminant et l’effet spatial se fait alors moins prégnant ; Stuttgart présente enfin le cas de figure inverse, puisque la motorisation des ménages n’y est bien expliquée que par la combinaison des variables qui constituent l’effet spatial décrit plus haut.
La relation entre deux caractères peut être schématisée par une régression linéaire, qui en établit un modèle d’estimation. A partir de l’équation de régression, on est alors en mesure d’estimer les valeurs de la motorisation, telles qu’elles sont expliquées par les variations d’une autre variable. L’intérêt porté à ces calculs par le géographe se focalise souvent sur l’indication des écarts entre la réalité et le modèle d’estimation. Ces résidus lui apparaissent instructifs dans la mesure où les différenciations spatiales révélées par leur cartographie permettent de dévoiler une logique explicative complémentaire. Néanmoins, réduire l’intérêt de cette méthode statistique pour la démarche géographique à l’analyse des résidus n’est pas sans risques : leur importance reste un signe que les conditions de la régression ne sont pas totalement satisfaites et ils peuvent alors aussi bien constituer des artefacts non interprétables. C’est pourquoi leur prise en compte doit se faire en complément du modèle d’explication lui-même et ne pas occulter les enseignements propres à celui-ci, notamment son pouvoir explicatif. 2066
Pour être intéressante et interprétable, l’étude des résidus suppose donc la combinaison d’une explication initiale pertinente et d’une logique complémentaire valide et spatialement lisible. Or, concernant l’estimation de la motorisation, ces conditions ne sont véritablement réunies que dans l’agglomération lyonnaise car c’est là que se combinent le mieux les deux effets révélés par nos précédentes analyses afin d’expliquer les disparités d’équipement automobile, effets dont la cartographie des résidus donne ici une illustration convaincante (figure 55 du chapitre 6).
Ainsi, les écarts au modèle d’estimation de la motorisation des ménages par le revenu font apparaître une structure radio-concentrique extrêmement nette, qui se caractérise par une surestimation (les résidus sont négatifs, la valeur observée étant inférieure à la valeur estimée par la modèle) dans les espaces les plus centraux et une sous-estimation (résidus positifs) dans les espaces les plus périphériques de la Communauté Urbaine. Il se confirme donc que, plus on se dirige vers les périphéries urbaines, plus la motorisation des ménages est en réalité supérieure à ce que pourrait laisser croire leur niveau de revenu – et inversement. En masquant de fait le rôle joué par le revenu, la distribution de ces résidus permet de visualiser spécifiquement l’effet spatial, dont on a souligné la nature composite mais dont l’existence est néanmoins attestée ici. De la même façon, on parvient à mettre en évidence cartographiquement l’effet revenu à travers les résidus du modèle d’estimation de la motorisation par une des trois variables participant à l’effet spatial, en l’occurrence la taille des ménages. Il apparaît clairement que, dans tout l’Ouest lyonnais, l’équipement automobile est sous-estimé par ce modèle, et ce contrairement à la partie orientale de l’agglomération. Il est alors facile d’expliquer cette opposition par des disparités en termes de revenu qui, tour à tour, "dopent" ou freinent la motorisation des ménages. Cet effet, s’il est spatialisé, correspond en effet à une logique de structuration qui relève de facteurs socio-économiques.
Sur cette illustration de la conjonction des deux effets, un point mérite cependant d’être clarifié : pourquoi, alors que le choix de la densité de population ou de la part de maisons individuelles n’offre pas une distribution des résidus clairement interprétable, l’effet revenu est-il mis en évidence en complément de l’explication inhérente à la taille des ménages ? A ce propos, ce n’est pas un hasard si cette dernière variable est la seule à présenter une corrélation non significative avec le revenu. Pour les autres, leur plus forte relation statistique avec cet indicateur socio-économique est le signe d’une redondance qui fait, qu’en ne s’attachant qu’à ce qui est "hors-modèle" (c’est le principe même de l’analyse des résidus), on perd une partie de l’information comprise dans l’effet revenu (d’où les difficultés d’interprétation concernant la distribution des résidus).
Pour associer plusieurs indicateurs dans un modèle d’explication globale, il existe enfin des méthodes statistiques plus adaptées : les modèles de régression linéaire multiple, avec comme instruments les coefficients de corrélation partielle et multiple.
En ne maintenant qu’une variable active et en considérant constant le rôle de la seconde, les coefficients de corrélation partielle vont nous permettre d’évaluer l’influence spécifique de chaque régresseur sur la variation de la motorisation (tableau A5). En s’affranchissant du piège de la redondance, ils concourent à préciser l’interprétation des coefficients de corrélation simple : ainsi, le fait qu’une variable présente un coefficient de corrélation simple significatif et un coefficient de corrélation partielle non significatif révèle qu’elle n’explique bien la motorisation que dans la mesure où elle s’accompagne des autres variables. Pour sélectionner les modèles d’estimation multiple les plus intéressants, il faut ensuite vérifier le respect des deux conditions suivantes : que le pouvoir explicatif du modèle 2067 soit évidemment le plus élevé possible et que la corrélation entre les régresseurs soit la plus faible possible. Par ailleurs, nous nous limiterons ici à la construction de modèles à deux régresseurs.
X1 | |||||||||||||||||
X X2 |
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Pour le Grand Lyon (tableau A6), les pouvoirs explicatifs des modèles potentiels oscillent entre 64 et 92%, mais de nombreuses combinaisons se situent autour de 80% ; on remarque également que celles qui prennent en compte la proportion de maisons individuelles possèdent les plus forts pouvoirs explicatifs. Il s’avère en fait que cette dernière variable constitue un élément-clé de l’explication de la motorisation des ménages : déjà présenté comme l’indicateur le plus fortement corrélé (d’après le calcul des coefficients de corrélation de Bravais-Pearson), on s’aperçoit ici que son influence spécifique ne se dément jamais, contrairement aux autres variables qui voient la leur s’effriter, devant le champ occupé par ce caractère. Il s’agit donc d’un élément explicatif déterminant dans l’approche du territoire de l’automobile-reine. Pourtant, il n’est guère possible de l’intégrer à un modèle d’estimation multiple car il est trop fortement corrélé avec l’ensemble des autres régresseurs potentiels, dans le sens où cette forme d’habitat, symptomatique d’un certain mode de vie, est aussi par certains aspects une variable de synthèse, qui tend à impliquer la motorisation de ses occupants, génère de faibles densités de population, s’adresse plus particulièrement aux ménages de taille élevée et suppose malgré tout un certain niveau de revenu.
Du point de vue statistique, il se dégage alors deux modèles d’estimation multiple valides : le premier associe le revenu à la taille des ménages pour expliquer les variations de la motorisation ; tandis que le second combine l’indicateur économique avec la densité de population. Ces modélisations ne contredisent en rien nos conclusions précédentes, puisqu’elles confirment toutes deux la complémentarité de l’effet spatial et de l’effet revenu, ainsi que les poids comparables des différents régresseurs.
Ménage | Revenu | Densité | Maisons | |||||||||||||||||
Ménage |
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Revenu |
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Densité |
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Maisons |
Si, pour la Communauté Urbaine de Lille (tableau A7), on s’intéresse d’abord aux seules conditions de validité statistique, il est possible d’étendre le nombre de modélisations potentielles à trois : le premier modèle peut être repris à l’identique, tout comme le deuxième ; quant au troisième, qui retient revenu et part des maisons individuelles comme variables explicatives, il convient sans doute de le replacer dans une perspective élargie, restituant la prégnance de ce type d’habitat dans la structure urbaine de l’agglomération.
En effet, seule la plus faible corrélation entre l’importance de l’habitat en maison individuelle et le revenu (0,46) permet de concevoir un troisième modèle d’estimation multiple. Le fait que cette forme d’habitat soit ainsi moins dépendante du niveau économique de la population révèle également sa plus grande diffusion (Lille compte plus de 25% de maisons, contre 3% à Lyon et moins de 8% à Villeurbanne). Cette moindre hétérogénéité des tissus urbains entre les communes de l’agglomération lilloise justifie l’affaiblissement général, par rapport au cas lyonnais, des modèles d’estimation multiple intégrant cette variable. L’effet spatial s’en trouve minoré, preuve qu’il est aussi tributaire des différences de structure urbaine. Indirectement, cela ne peut qu’affermir un effet revenu qui est partie prenante des trois modèles aux plus forts pouvoirs explicatifs, même si son importance reste avant tout soumise à l’histoire et la nature-même du processus de motorisation.
Ménage | Revenu | Densité | Maisons | |||||||||||||||||
Ménage |
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Revenu |
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Densité |
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Maisons |
A l’échelle de la région urbaine de Stuttgart, les différentes "combinaisons multiples" affichent des pouvoirs explicatifs beaucoup plus faibles que ce que l’on a pu observer précédemment pour Lyon et Lille, aucune ne dépassant les 50%. Cependant, compte tenu du nombre d’individus statistiques pris en compte, le test de Fisher-Snedecor conclut à la significativité de l’ensemble des coefficients de corrélation multiple. Le principal enseignement à tirer de ces modèles réside alors dans la confirmation de la faiblesse de l’influence spécifique du revenu (révélée par la valeur des coefficients de corrélation partielle) par rapport aux deux régresseurs incarnant ici l’effet spatial 2068 – deux régresseurs par ailleurs trop fortement corrélés entre eux pour prétendre constituer ensemble un modèle valide d’estimation multiple.
Ensuite, si l’on revient davantage à l’échelle de l’agglomération, ce qui a pour effet d’éliminer beaucoup de bruit, on observe une nette montée des pouvoirs explicatifs, essentiellement imputable au renforcement de l’influence spécifique de la densité de population dans les tentatives d’explication de la motorisation. Un modèle se démarque toutefois assez nettement, puisqu’il combine le plus fort coefficient de corrélation multiple et la plus faible relation entre les régresseurs : associant le revenu à la densité, il réitère nos précédentes analyses sur l’agglomération de Stuttgart, en concevant un schéma global où les variations de la motorisation des ménages sont exclusivement expliquées par la variable spatiale – l’influence spécifique du revenu étant ici nulle.
Ménage | Revenu | Densité | |||||||||||||
Ménage |
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Revenu |
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Densité |
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Ménage | Revenu | Densité | |||||||||||||
Ménage |
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Revenu |
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Densité |
Cette prépondérance de la densité de population tend à souligner un aspect entrevu lors de notre analyse du cas lillois : en effet, l’acuité avec laquelle s’exprime l’effet spatial n’impose-t-elle pas, outre l’ancienneté du processus de motorisation, une autre explication complémentaire ? Ainsi, le caractère aggloméré ou non de la population, que les mesures de densité appréhendent bien, tend à favoriser la compétitivité, et souvent l’existence-même, d’une alternative en transports collectifs, ce qui constitue un canal supplémentaire d’action sur la motorisation et d’explication des disparités d’équipement par des paramètres spatiaux, car les ménages en situation de desserte quasi-monopolistique par l’automobile se trouvent le plus souvent acculés à une obligation de motorisation. L’effet spatial n’est-il donc pas d’autant plus fort que les structures urbaines constituées se prêtent à son exercice ? Et n’est-ce pas finalement là un de ses principes d’existence ? En tout état de cause, cela doit nous amener à le considérer, non comme un reliquat explicatif qui agirait quand l’effet revenu aurait cessé d’être discriminant, mais bel et bien comme un phénomène central, véhiculant ses propres logiques, ses propres pesanteurs et ses propres dynamiques.
Ce travail statistique contribue finalement à mettre en évidence une double logique d’explication des disparités d’équipement automobile. Permettant d’appréhender l’essentiel de l’information, cette double logique a été conceptualisée par la conjugaison d’un effet revenu et d’un effet spatial, néanmoins susceptibles de faire l’objet de pondérations différentes selon les terrains étudiés. Ces conclusions corroborent certaines analyses menées dans une perspective plus large et démontrant « que l’appartenance à des zones urbaines centrales ou périphériques n’explique pas à elle seule les pratiques et représentations relatives à la mobilité spatiale. La dimension centre-périphérie agit conjointement avec au moins deux autres dimensions : la stratification sociale et le cycle de vie. » 2069
Comme on ne compare pas directement entre elles les valeurs de ces distributions dans nos trois agglomérations, le fait de ne pas pouvoir disposer du même indicateur économique pour la France et pour l’Allemagne n’apparaît pas comme un problème fondamental.
Plusieurs autres variables ont été testées mais n’ont pas été retenues compte tenu de la faible information qu’elles apportaient à l’explication de la distribution des taux de motorisation à l’échelle de l’agglomération. Il s’agit entre autres de données relatives aux migrations alternantes, comme le pourcentage d’actifs travaillant dans la commune, ou encore de statistiques donnant une idée du type de processus d’urbanisation auquel a été soumis le territoire communal, comme la structure des logements selon leur date de construction.
Comme le ménage est une notion qui n’apparaît pas dans les statistiques du Land du Bade-Wurtemberg, nous avons calculé cet indicateur en remplaçant le nombre de ménages par le nombre de logements de la commune.
De la même façon, cet indicateur est devenu, pour Stuttgart, le nombre moyen de personnes par logement.
Y apparaissent en gras les coefficients de corrélation significatifs, c’est-à-dire ayant satisfait au test de Bravais-Pearson pour un risque d’erreur fixé à 2%. Dans le tableau 2, il faut par exemple, pour les 55 communes du Grand Lyon (d’où = 53), que le coefficient soit supérieur à 0,3137 pour être considéré significatif.
Il correspond au coefficient de détermination, obtenu en élevant au carré le coefficient de corrélation.
A l’image de la régression simple, il est obtenu en élevant au carré le coefficient de corrélation multiple.
la proportion de maisons individuelles n’étant malheureusement pas disponible.
PLAN URBANISME CONSTRUCTION ARCHITECTURE, 2000, op.cit., p.25.