Nos hypothèses de départ postulaient qu’il est possible, au sein des productions langagières orales et écrites en situation monogérées, de distinguer différentes phases énonciatives (HS1) et, par conséquent, que les sujets des deux formations proposeraient une énonciation argumentative en trois phases encadrées par une introduction et une conclusion (HS2), quelle que soit la situation monogérée. Nous nous attendions donc à ne discerner aucune différence entre les situations monogérées ni entre les destinataires (HS3).
Par ailleurs, nous postulions (HS4) que les arguments pouvaient être de nature – arguments du locuteur ou du destinataire - et de catégories – arguments de conséquence, de solution et d’implication personnelle du destinataire – différents, soutenus par des indicateurs psycholinguistiques repérables (formes modalisées ou axiologiques).
Enfin, nous nous (HS5) attendions à trouver des profils énonciatifs différents selon la manière qu’aurait le locuteur de prendre en charge ou non son énonciation vis-à-vis du destinataire.
L’analyse statistique montre que les deux formations argumentent de la même manière en situation monogérée orale, alors qu’à l’écrit une différence apparaît située sur la phase C. Cette phase est plus utilisée chez les sujets en lycée général que professionnel lors de la dernière tâche, c’est-à-dire lorsqu’il y a un changement de destinataire. Cette différence qui apparaît entre les deux groupes est également présente entre les situations monogérées orales et écrites pour les sujets en lycée général : la phase C est plus souvent produite à l’écrit qu’à l’oral notamment dans les tâches T1 et T3. Ce qui indique de nouveau un effet du destinataire puisque dans ces deux tâches les sujets n’ont pas affaire aux mêmes destinataires. Pour les sujets en lycée professionnel, c’est sur la présence de la conclusion qu’apparaît une différence significative entre les situations monogérées : les sujets s’en servent plus à l’écrit qu’à l’oral. Nous notons ici non pas un effet du destinataire mais de la modalité de production. L’autre différence significative sur ce groupe porte sur la phase A dans le cadre des situations monogérées orales : elle est plus présente dans la tâche T3 que dans les autres tâches.
Ces résultats nous éclairent sur le fait que les sujets des deux groupes argumentent sensiblement de la même façon en situation monogérée orale et écrites. Toutefois, ils ne nous disent pas si les trois phases énonciatives encadrées par une introduction et une conclusion sont systématiquement présentes. C’est l’analyse exploratoire qui nous a permis de comprendre mieux ce qui se passe dans chacune des situations monogérées tout en tenant compte du destinataire. Les résultats de ces analyses dévoilent que les sujets produisent plutôt des argumentations en une ou deux phases encadrée(s) ou non par une introduction et une conclusion. Néanmoins, il nous apparaît possible d’établir un schéma énonciatif argumentatif pour chacun des destinataires en considérant non seulement la présence ou l’absence de phases encadrées par une introduction et une conclusion mais également la nature et le genre d’arguments proposés par les locuteurs 56 . Nous ne prendrons pas en compte les formes modalisées et axiologiques dans ces schémas énonciatifs puisqu’il n’y a pas vraiment de différences qui ressortent entre les destinataires et les situations monogérées. D’une manière générale, les modalisations de certitude et les formes axiologiques sont les deux indicateurs psycholinguistiques les plus utilisés, notamment dans la phase B, mais également dans la phase A pour les formes axiologiques.
L’ensemble des locuteurs n’argumentant jamais tous de la même façon il est difficile d’établir un schéma énonciatif prenant en compte l’ensemble des variations. Nous proposons donc une synthèse en fonction des grandes tendances.