Le chaos entre ergodicité et attracteurs étranges

La rencontre des problèmes du chaos et de la turbulence ne tient donc pas seulement d’une rencontre de circonstances, limitée à une opération de récupération du système de Lorenz par Ruelle au profit des attracteurs étranges ou par Li et Yorke pour leurs études des itérations. Il y a une grande proximité conceptuelle, due en partie à la forte présence des mathématiques des systèmes dynamiques. La problématique de l’ergodicité de la dynamique rapproche les deux thématiques, et apparaîtra à plusieurs reprises au cours des discussions à venir 445 . Tout ceci contribue à la formation des embryons de conceptions de chaos qui se structurent avec les propositions de Li, Yorke et Ruelle.

Nous avons ainsi montré comment, sous l’impulsion de Ruelle, les attracteurs étranges, la sensibilité aux conditions initiales et la problématique de l’ergodicité sont entrés au coeur de la turbulence d’abord, pour se prolonger dans le champ du chaos après 1975. Le résultat de Li et Yorke a contribué à ce mouvement, même si ce n’est pas une contribution majeure, et en a également bénéficié.

L’importance du travail de Ruelle tient aussi à l’effort de recherche qu’il va susciter. Ainsi, de même que les propositions de Li et Yorke sont reprises et discutées, les notions de sensibilité aux conditions initiales et d’attracteurs étranges font l’objet de nombreuses analyses. Les intuitions et la démarche de Ruelle sont prolongées de manière spectaculaire, contribuant à renforcer les tendances souhaitées par celui-ci. Plusieurs de nos paragraphes, et, en fait, pratiquement tout ce qui est discuté dans cet épisode 1975-82, abordent ces prolongements. Nous commencerons par montrer l’importance prise par la question des attracteurs étranges.

Notes
445.

Afin de saisir l’ampleur de la problématique, nous mentionnons le paragraphe dédié au texte de B. Chirikov (p. 211), à celui de R. Helleman (p. 229), aux exposants de Lyapounov (Chapitre 4, p. 284), aux notions d’entropie (Chapitre 4, p. 291).