a. Robert Stetson Shaw

Robert S. Shaw (né en 1946) fait partie du groupe d’étudiants de l’Université de Santa Cruz, en Californie, regroupant notamment Doyne Farmer, Norman Packard, James Crutchfield, dont la petite histoire a été racontée dans l’ouvrage de Gleick 656 . Ils se sont proclamés "Collectif des systèmes dynamiques" 657 .

En 1977, Shaw prépare une thèse sur la supraconductivité et se trouve proche de la conclusion 658 . Le cosmologue et relativiste William Burke lui demande alors s’il peut réaliser une simulation sur l’ordinateur analogique dont Shaw a une certaine maîtrise : il s’agit de l’attracteur de Lorenz, dont la connaissance a été porté à Burke par l’astrophysicien Edward Spiegel 659 . Le sujet prend de l’ampleur et devient l’"attraction" du département de physique. Shaw décide dans la continuité de se consacrer à l’étude des attracteurs étranges, de ces questions de chaos, et donc d’abandonner sa thèse. Son article publié en 1981, "Strange attractors, Chaotic behavior, and Information flow" dresse un bilan de ses réflexions ; l’article circulait déjà en 1978 sous forme de prétirage 660 .

Shaw a la chance d’assister à la première grande réunion sur le non linéaire à New York en décembre 1977 ; il s’aperçoit à ce moment là de l’aspect novateur de sa perspective et de l’apport de ses prédécesseurs 661 .

Dans son article, Shaw propose une révision, une réinterprétation des comportements turbulents, selon l’optique de la théorie de l’information 662 . Il existe beaucoup de similarités dans les études des comportements qualifiés de turbulents ou chaotiques : la première critique de Shaw est d’affirmer que tout ceci est resté dans "le royaume des ‘métaphores mathématiques’" 663 . Ce qui annonce la teneur plus "physicienne" de son projet.

‘"Nous allons tenter de répondre à cette question [les similarités de comportements] en nous appuyant sur quelques notions physiques, notamment celle de longueur d’incertitude, et de flux d’information, pour nous guider à travers les grandes aires du sujet qui n’ont pas donné lieu à des tentatives d’analyses mathématiques." 664

Le travail produit par Shaw est à la croisée de la physique, des mathématiques et de la simulation analogique. Il n’y a pas vraiment de dominante, si ce n’est la notion d’information, qui est à la fois la clé de voûte des réflexions, de son interprétation, et l’élément qui fait le pont entre ces différents domaines 665 .

Notes
656.

[GLEICK, J., 1991]. Sous une forme beaucoup plus romancées, et pour des aventures postérieures et indépendantes des considérations présentées ici, on peut aussi consulter les deux romans de T. Bass : The Eudaemonic Pie [BASS, T.A., 2000] et Ils ont battu Wall Street !, [BASS, T.A., 2002].

657.

Voir le chapitre de [GLEICK, J., 1991] (p. 305-341) consacré à ce groupe. La référence au "Dynamical Systems Collecitve" se trouve également dans leurs articles tel [PACKARD, N.H., CRUTCHFIELD, J.P., FARMER, J.D., SHAW, R.S., 1981], p. 712.

658.

Il en commencera une autre, achevée en 1980 sur le sujet On the predictability of Mechanical Systems, ce qui est très directement lié à ses préoccupations au sujet du chaos.

659.

Spiegel connaît Lorenz depuis les années 1960, [GLEICK, J., 1991] p. 309.

660.

Gleick rapporte qu’il a été tiré à plus de 1000 exemplaires, [GLEICK, J., 1991], p. 325.

661.

[GLEICK, J., 1991], p. 324.

662.

Pour les aspects plus propres à l’information et à la théorie de l’information nous renvoyons à la thèse de J. Segal et à son analyse du même texte de Shaw : [SEGAL, J., 1998], p. 613-624.

663.

"in the realm of "mathematical metaphors".", [SHAW, R.S., 1981], p. 81.

664.

" We will attempt to answer it relying on a few simple physical notions, notably those of an uncertainty length, and information flow, to guide us past the large areas of the subject which have not yielded to attempts at mathematical analysis", [SHAW, R.S., 1981], p. 81.

665.

Voir [SEGAL, J., 1998], p. 617 et p. 621, en particulier.