5.6. Conclusion : 1981, la synthèse de J.P. Eckmann

a. Premières conclusions

De nos analyses il ressort donc que plusieurs scénarios de transitions ont été proposés dans la période 1975-82. Ils émergent dans des contextes différents ; les démarches de constructions et les concepts mis en jeu varient d’une situation à l’autre. Ils sont tous des combinaisons de mathématiques, de simulations numériques et de physique. Si le résultat peut s’exprimer en termes mathématiques il ne s’agit pas d’"applications" des mathématiques. Au contraire, les mathématiques sont entraînées, voire dépassées, par une vision et une pratique de physicien. Sur ces points, les cas de Coullet et Tresser, Feigenbaum, Pomeau et Manneville ne sont pas isolés et nous renvoient aux travaux de Rössler et Shaw notamment.

Nous avons souligné le rapport entre les conceptions de chaos et les questions de transition vers le chaos, très clair chez Ruelle et Takens, pour Coullet et Tresser, perceptible chez Mira et Gumowski. Dans le cas de Feigenbaum la situation est finalement plus simple. D’une part, il est plus préoccupé par l’universalité des transitions par doublement de période, que par les notions de chaos ; d’autre part, une définition faible peut assurer, à elle seule, ses besoins théoriques. Ainsi, les considérations de May (Li et Yorke) de 1976, sur lesquelles il s’appuie, sont suffisantes, contrairement aux constructions conceptuelles de Coullet et Tresser. Enfin, chez Pomeau et Manneville, dans leur construction du scénario d’intermittence, ce ne sont pas tant les notions de chaos que la panoplie des systèmes dynamiques qui s’exprime.

Il nous reste à expliquer la réduction-sélection à l’œuvre vers 1981 dans cet ensemble de propositions. Un article a bousculé la convergence vers le triptyque Ruelle-Takens / doublement de période / intermittence : celui de Jean-Pierre Eckmann, "Roads to turbulence in dissipative dynamical systems".