Le renouveau de l’ergodicité

Précisons la nature des changements opérés par Birkhoff.

L’hypothèse ergodique (ou quasi-ergodique) était une affirmation concernant la dynamique d’un système, destinée à justifier un traitement statistique. En un sens, il est tout à fait légitime que des considérations de Mécanique, ou sur les systèmes dynamiques, interviennent dans ce contexte ; nous l’avons vu avec les multiples débats entre Maxwell, Boltzmann et ses contradicteurs, avec l’utilisation du théorème de récurrence de Poincaré issu des problèmes de Mécanique céleste (pour le paradoxe de Zermelo-Planck par exemple 1074 ). De la même façon, les résultats de Birkhoff sur les systèmes dynamiques sont investis dans la question de l’ergodicité et le changement est à la hauteur de l’évolution induite par Birkhoff. L’importance de la dynamique, déterministe, dans l’épistémologie de Birkhoff n’est pas étrangère à ses recherches : la réflexion sur l’ergodicité, comme justification de l’utilisation des probabilités et moyen de maintenir dans une philosophie fréquentiste des probabilités (comme les Ehrenfest l’ont promue) trouve un écho remarquable chez Birkhoff.

La seconde évolution importante de 1931 tient à l’utilisation des probabilités, sous forme de théorie de la mesure. La théorie de la mesure intervient doublement : dans l’hypothèse de transitivité métrique et dans le résultat final, valable "presque partout". Selon Birkhoff, c’est la nécessité de considérer des résultats valables "en général" qui conduit à introduire ces probabilités 1075 . Il rappelle d’ailleurs que Poincaré, avec son théorème de récurrence, avait inauguré cette perspective. La mise sous forme de théorie de la mesure est lourde de conséquences. En effet, si la théorie ergodique, avec Birkhoff, s’inscrit dans une recherche sur la dynamique, l’introduction de ces perfectionnements mathématiques ouvre des voies aux théories des probabilités, en plein développement dans les années 1930 (sur la base de la théorie de la mesure).

Notes
1074.

Cf. chapitre 2, p. 105.

1075.

Dans "Probability and physical systems" : "As far as I know, it was Koopman, among mathematicians, who first emphasized the importance of getting away from the exclusive consideration of those "properties which are changed altogether by an infinitely small change in the physical conditions attendant on the problem, or by the slightest change in initial data" and of obtaining results which are valid in general. Evidently results of this type are likely to bring in considerations of probability.", [BIRKHOFF, G.D., 1932b], p. 365 (en italique dans le texte).