Probabilité et ergodicité

Dans ses travaux ultérieurs, le développement du sujet est important et unique en son genre. Nous singulariserons deux de ces travaux : l’article de 1934 intitulé "On causality, statistics and probability" 1082 et son ouvrage Ergodentheorie 1083 de 1937.

Dans le texte de 1934, comme le titre ne l’indique pas, Hopf aborde à la fois la théorie ergodique et le problème de fondements des probabilités. En introduction du texte, Hopf montre qu’il s’inscrit dans le cadre fréquentiste et mécaniste, naturellement associé aux considérations de Mécanique statistique depuis les Ehrenfest. Il remarque 

‘"[…] avec quelle précision le concept de hasard peut être défini et comment il est naturel de déduire les lois fondamentales des probabilités, une fois qu’il est reconnu que les phénomènes fréquentiels sont produits par des causes strictement mécaniques" 1084

En liant probabilité et théorie ergodique, en cherchant une inspiration réciproque dans ces domaines, Hopf aboutit à une régénération de la théorie ergodique. Ainsi, d’une part, il cherche à définir les probabilités par la théorie des fonctions arbitraires. Hopf reprend l’exemple de la roulette, donné par Poincaré et formule, en terme de théorie de la mesure, l’idée suivante : l’équiprobabilité rouge / noir provient de la continuité de la distribution initiale des impulsions données à la roulette (comme Poincaré l’explique schématiquement dans "Le hasard" 1085 ). D’autre part, Hopf introduit et développe des notions de théorie ergodique comme la notion de "mélange", dont l’importance se révèlera quelques années plus tard. Mais déjà, il suggère de remplacer la notion de transitivité métrique par celle de mélange, transformant ainsi à nouveau, la notion d’ergodicité.

Pour élaborer la notion de mélange, Hopf a en fait repris une idée de Gibbs. Par ailleurs, en 1932, Hopf avait déjà abordé ce problème dans son article sur le mélange des liquides, selon les conceptions de Poincaré. Mais, en 1934, il donne la première formulation mathématique rigoureuse du mélange. Ainsi la comparaison avec la transitivité métrique est possible, alors qu’en 1932, Hopf s’était limité à une mise en perspective plus intuitive.

En retour, ses résultats de théorie ergodique servent à préciser le cadre de la théorie des fonctions arbitraires, c’est-à-dire sa théorie des probabilités. Son résultat principal est une loi des grands nombres, obtenue grâce aux théorèmes ergodiques. Dans cette perspective Hopf s’éloigne progressivement du problème des fondements de la Mécanique statistique. Il oriente la théorie ergodique vers la définition du hasard et des probabilités, en laissant reposer ces considérations sur une philosophie mécaniste, déterministe.

Notes
1082.

[HOPF, E., 1934]

1083.

[HOPF, E., 1937].

1084.

"[…] how accurately the concept of chance maybe defined and how naturally the fundamental laws of probability may be derived, once frequency phenomena are recognized as produced by strictly causal mechanisms.", introduction de [HOPF, E., 1934].

1085.

Cf. p. 82.