10.3. Les années 1970 : vers le chaos chimique

Au début des années 1970, malgré une évolution conceptuelle importante, les réticences à l’égard des oscillations chimiques subsistent. En 1972, Degn commente la situation :

‘"Bien qu’il semble maintenant exister une abondance de preuves en faveur de l’existence de réactions chimiques homogènes, il y a toujours des théoriciens pour résister à cette idée, et aussi quelques expérimentateurs qui pensent que ces oscillations homogènes présumées sont causées par des particules résiduelles, alors que personne n’a expliqué comment." 1563

Les preuves en question sont à la fois les résultats expérimentaux entourant la réaction de Belousov-Zhabotinsky et les nouvelles dispositions théoriques échafaudées par l’Ecole de Bruxelles. Les positions avancées par l’école belge ne satisfont pas tout le monde. Ainsi en 1969, des chimistes, comme C.J. Swartz, considèrent que le second principe de la thermodynamique oblige à renoncer à l’idée d’oscillations homogènes 1564 . Le verrou thermodynamique est partiellement levé mais les considérations nouvelles n’ont pas le poids de l’histoire et ne bénéficient pas encore de toute la publicité du prix Nobel attribué en 1977 à Prigogine.

L’impulsion de la fin des années 1960 va néanmoins se prolonger dans une reconnaissance plus large des oscillations chimiques grâce aux développements théoriques et expérimentaux concernant la réaction de Belousov-Zhabotinsky, appuyés sur le mécanisme FKN. Au fil des années 1970 se dessine ainsi une véritable chimie non linéaire, dont les conceptions et les pratiques transparaîtront dans l’analyse du chaos chimique.

Notes
1563.

"Although there now seems to be abundant evidence for the existence of homogeneous oscillating reactions, there are still theoreticians who resist the idea, and also a few experimentalists think that alleged homogeneous oscillations are caused by dust particles, although nobody has explained how.", in [DEGN, H., 1972], p. 302.

1564.

[SWARTZ, C.J., 1969]. Voir [DEGN, H., 1972] ou [WINFREE, A., 1984] donnant quelques exemples des hésitations de la communauté des chimistes au début des années 1970.