10.5. Conclusion : chaos et oscillations chimiques

En parallèle à la théorie des oscillations non linéaires, les oscillations chimiques ont donc joué un rôle décisif dans l’histoire du chaos. La chimie non linéaire s’est élevée au rang de domaine de recherche dans les années 1970, quelques temps avant que le champ du chaos n’émerge. L’essor de chacun de ces domaines de recherche est associé à l’autre. Les mathématiques des systèmes dynamiques et l’ordinateur sont au centre des développements concernant les oscillations chimiques et conduisant au chaos chimique, lequel prend son sens avec les notions d’attracteur étrange et d’orbite homocline. A travers cet exemple emblématique nous avons également montré que le chaos et les conceptions de Rössler tout particulièrement sont le résultat d’une lente évolution qui prend ses racines dans la chimie des oscillations, aux côtés de multiples disciplines. En outre, le raisonnement analogique s’est illustré une fois de plus dans cette histoire. Dans la lignée de Van der Pol et Lotka, de nombreuses analogies avec les mathématiques, entre la biologie et la chimie, la biologie et l’électricité notamment ont marqué ce cheminement conceptuel prolongé par la pratique analogique de Rössler.

Enfin, le domaine de la science du chaos autour de 1980 témoigne d’une grande facilité à transférer les concepts, les pratiques, les outils, les modèles d’une discipline ou d’un domaine à l’autre : l’hydrodynamique apporte des moyens d’analyse à la chimie, les mathématiques de la dynamique et du chaos orientent les recherches d’attracteurs étranges et leur examen. En y adjoignant les pratiques observées au sujet de la dynamique des populations ou encore des transitions vers le chaos, il semble que la grande mathématisation du domaine du chaos, l’utilisation de la simulation numérique et la focalisation sur la dynamique des systèmes sont les facteurs déterminants de cette grande souplesse dans la science du chaos.