La situation des mathématiques pures

Pour le dire simplement, le CNRS est maintenu dans une position où il ne décide de pratiquement rien de la recherche en mathématiques pures en France, jusqu’à la fin des années 1980. La situation est donc la suivante.

En 1948, il y a 32 chercheurs en mathématiques "pures" au CNRS, et 35 en 1960 1601 . Ce sont essentiellement des Attachés de Recherche (AR), c’est-à-dire, pour la plupart, des doctorants. Ces chiffres, très faibles par rapport aux autres sections, traduisent le peu d’ancienneté de ces chercheurs au sein du CNRS : on ne fait que transiter par le CNRS en "mathématiques pures", avant de prendre un poste à l’université. La situation en 1969 n’a guère évolué : il y a 15 Attachés de Recherche (AR), 4 Maîtres de Recherche (MR) et un Directeur de Recherche (DR) temporaire au CNRS, contre 150 maîtres de conférence et 197 professeurs de mathématiques dans les Facultés de France 1602 . Cela est corrélé au fait qu’il n’y a pas de laboratoire propre de mathématiques pures au CNRS. 

Le CNRS a une place très limitée dans la communauté des mathématiques pures et la situation se maintient pour plusieurs raisons. La première d’entre elles est liée à un certain idéal de la recherche en mathématiques "pures". Les idées développées par le groupe Bourbaki, dont les membres comptent parmi les plus éminents de cette communauté, ont joué un rôle important dans la persistance de ces idées. Nous allons voir que les conceptions générales des universitaires, sans être nécessairement inspirées par Bourbaki, participent de cet idéal commun et surtout expliquent partiellement l’"abandon" du non linéaire par les mathématiques pures, non sans paradoxe.

Notes
1601.

On dénombre, en 1948 : 29 Attachés de Recherche (AR), un Chargé de Recherche (CR), 2 Maîtres de Recherche (MR). En 1960 : 32 AR, 2 CR, un Directeur de Recherche (DR).

1602.

Rapport de conjoncture du CNRS 1969, section 1, p. 14.