Vers les SPI

Malgré les libertés autorisées par le cadre du CNRS, les recherches de Mira et Gumowski s’inscrivent dans l’évolution générale du LAAS. Or le LAAS est en plein cœur de la mise en place des SPI et son directeur J. Lagasse est un des artisans du secteur SPI, au niveau national. D’une certaine manière, dès sa création, le LAAS a été un prototype des laboratoires SPI car ses missions couvraient une recherche en Automatique tant théorique qu’appliquée et ouverte sur le domaine spatial et économique. La vocation de laboratoire SPI est affirmée dès 1972, dans le rapport d’activité annuel qui souligne les efforts du laboratoire d’ouverture vers la communauté scientifique et le secteur économique, ainsi que l’équilibre entre "recherche spéculative" et "recherche d’adaptation". Cependant, cette vocation est aussi une construction dans le temps. Elle passe par des réorganisations successives. Le schéma d’organisation du laboratoire, d’abord calqué sur les missions, évolue en deux divisions "Automatique" et "Composants Electroniques" 1713 , puis vers trois divisions de recherche "Systèmes complexes", "Structure des systèmes de commande automatique", "Composants électroniques" 1714 .

Cette évolution et le changement de nom du laboratoire en novembre 1972 (pour devenir le Laboratoire d’Automatique et d’Analyse des Systèmes) indiquent une mutation de l’activité de recherche au sein du laboratoire. Par une conduite de recherche selon des opérations de recherche, le laboratoire décloisonne les divisions et s’assure une grande mobilité thématique. L’activité du laboratoire est marquée durant les années 1970, par des évolutions rapides de thématiques, au gré de l’intérêt suscité par tel ou tel résultat 1715 . L’effort d’ouverture se concrétise rapidement en contacts et contrats de recherches 1716 .

La modélisation des systèmes "complexes" et le développement des moyens informatiques sont emblématiques de l’évolution du LAAS. Les scientifiques s’intéressent à la question de l’automatisation des systèmes complexes 1717 . Le meilleur exemple est celui de l’étude de régulation de trafic urbain dans la ville de Toulouse : le LAAS réalise un simulateur de trafic couplé à un calculateur numérique permettant d’expérimenter différentes politiques de commandes du trafic. Cette réalisation incarne le souci de traiter un problème tout à fait concret, de mettre au service de l’automatique les moyens informatiques et de simulation. Aussi, les recherches de la division "Systèmes complexes" (crée en 1975) s’orientent tant vers la modélisation, la simulation stochastique que vers les problèmes de décomposition et stabilité des systèmes interconnectés, de grande dimension.

L’évolution globale du laboratoire va donc dans le sens de l’utilisation d’outils informatiques toujours plus puissants et adaptés au traitement de problèmes "réels", issus du monde socio-économique. Pour cela le LAAS est très représentatif des bouleversements entamés dans les années 1970.

Notes
1713.

Rapport au comité directeur, novembre 1974, G 850001 Art 7, Archives du CNRS.

1714.

Rapport au comité directeur, novembre 1976, G 850001 Art 7, Archives du CNRS.

1715.

L’année 1975 voit l’arrêt de quatre opérations et la création de quatre nouvelles. Les opérations "stabilisation d’attitude des satellites déformables", "Propulsion électrique dans ses applications spatiales", "Réacteur en lit fluide", "Quadripolaires" sont stoppées. Les opérations "Modélisation des structures logiques", "Sécurité et diagnostic", "Filtrage et Estimation", "Transmission de données" sont crées. Rapport au comité directeur, novembre 1974, G 850001 Art 7, Archives du CNRS.

1716.

Pratiquement circonscrits aux CNES et DGRST, les contacts s’élargissent avec des ouvertures vers d’autres entreprises : SNCF, ALSTHOM, CGA (Compagnie Générale d’Automatique) ou organismes comme le CERN.

1717.

Les automaticiens proposent une définition : les systèmes complexes "font intervenir un grand nombre de variables sans qu’il soit toujours possible de les spécifier précisément a priori. La mesure des variables utilisées n’est jamais simple et l’expérimentation le plus souvent impossible. L’énergie proprement dite ne joue qu’un rôle secondaire au point de vue de leur fonctionnement. Ils ont un caractère stochastique marqué et souvent l’intervention humaine y joue un rôle fondamental", Rapport d’activité du CNRS 1974, p. 225.