a. Vers le département des Sciences Physiques et Mathématiques (SPM)

Le redécoupage du Comité National se négocie dans l’année 1990-91. Dès les premières moutures, le découpage

‘"est asservi à une logique d’évolution scientifique fondée sur l’organisation des sciences en champs scientifiques réassociant les disciplines. Les futures sections seront donc élargies avec une ouverture de leurs thématiques, de l’amont à l’aval. La possibilité d’existence de sections aux interfaces entre plusieurs départements, susceptibles de développer des domaines nouveaux, est un élément important de cette évolution (Plasmas, matière molle,...)" 1825 .’

Le projet définitif de septembre 1991 traduit le changement de définition annoncé. Il est présenté par le directeur du département, Daniel Thoulouze, dans une lettre du MPB-SPM 1826 . Désormais, les départements ne sont plus construits à partir des sections du Comité National mais "à partir des thématiques et des laboratoires qui leur sont attachés" 1827 . L’évaluation se fera par les sections du Comité National, qui peuvent être communes à deux départements 1828 .

‘"Au-delà de cet aspect formel, il n’y a plus de mathématiques ou physique de base, mais les mathématiques et la physique dans leur globalité, de l’amont à l’aval, du fondamental aux applications, qui irriguent l’ensemble des disciplines." 1829

En arrière-plan de ces intentions, il y a l’idée que les mathématiques et la physique fournissent un bon nombre de concepts pour étudier des systèmes complexes, proches de la réalité. Un comité de la physique sera crée pour coordonner les actions au CNRS, dans différents départements et un Comité des interactions des mathématiques pour développer les interfaces avec les autres disciplines 1830  : informatique, robotique, économie, biologie, mécanique, atmosphère, etc. "Des thématiques nouvelles peuvent apparaître à partir des problèmes réels qui se posent aux ingénieurs. Un continuum devrait exister dans les laboratoires entre les sujets de la recherche fondamentale et leurs applications" 1831 .

Les rapports avec le monde socio-économique ne sont plus tabous :

‘"Il est souhaitable, dans ces conditions, qu’un couplage important s’établisse dans de nombreux domaines, entre les entreprises et nos laboratoires. Nous devons nous rapprocher des préoccupations des entreprises pour faire émerger les points sensibles où des difficultés importantes restent à résoudre. Nous pourrons ainsi mieux appliquer nos connaissances à des sujets pertinents" 1832 .’

Enfin,

‘"il ne s’agit pas pour nos laboratoires, d’obtenir seulement des moyens supplémentaires. Une telle démarche de ‘recherche accompagnée’ est certainement un des meilleurs moyens d’ouvrir notre recherche fondamentale et de diffuser la Science dans la société" 1833 . ’

En un mot, la constitution du SPM est l’aboutissement de plusieurs années d’évolutions et de réflexions, latentes dans les années 1980 et cristallisées dans le rapport de conjoncture 1989. Dans l’absolu, la mise en place d’une telle coordination aurait pu être décidée plus tôt, dans le courant des années 1980 ; elle aurait pu aussi tarder encore. C’est là que la volonté de l’équipe dirigeante, du directeur du CNRS, François Kourilsky (de 1988 à 1994) au directeur du département des MPB-SPM a joué et provoqué cette réorganisation. D. Thoulouze était en effet attaché à définir une politique de la science volontariste, pragmatique ; il est en phase avec Kourilsky sur ce point 1834 .

Le changement ne se limite pas à la constitution d’un département. A un niveau général, il se construit une politique scientifique en mathématiques et physique au département SPM, et au niveau local, plusieurs actions sont entreprises.

Notes
1825.

Lettre MPB, n° 14, Décembre 1990, p. 2. La discussion concerne le projet provisoire arrêté au 22 novembre 1990.

1826.

Lettre MPB, n° 16, Juillet-août 1991.

1827.

Ibid., p. 2.

1828.

Les sections 4 et 8 sont communes SPI-SPM, la 15 est commune SPM-SC.

1829.

Ibid., p. 2.

1830.

Nous ne sommes pas parvenu à suivre l’évolution de ce comité (a-t-il été un comité éphémère ?). Toujours est-il que de la première réunion en 1992 il ressort surtout (ce n’est pas nouveau) qu’il y a nécessité d’associer les mathématiques à d’autres sciences pour une interaction efficace, "contrairement à une idée trop répandue ces dernières années suivant laquelle des mathématiciens purs pourraient être à l’écoute directe des industriels", (Lettre SPM, n° 19, Juillet-août 1992, p. 24). La remontée vers les mathématiques est insuffisante et la mesure préconisée est la suivante : il faudrait "immerger des individus ou équipes de mathématiciens dans des laboratoires de ces disciplines" (informatique, météorologie, économie...) (Ibid.).

1831.

Lettre MPB, n° 16, Juillet-août 1991.

1832.

Ibid.

1833.

Ibid.

1834.

Entretien avec D. Thoulouze, 18 juin 2003. Nous renvoyons à la thèse de C. Vilkas [VILKAS, C., 2001], consacrée en partie à la gestion de la recherche au MPB-SPM.