On dispose de nombreux travaux de recherche ou documents officiels traitant des aspects administratifs de la mobilité professionnelle des fonctionnaires. Le cadre réglementaire et législatif sera analysé ultérieurement à propos des formes de mobilité professionnelle à l'intérieur de l'Éducation nationale. Le chapitre deux nous permettra de prendre en compte les travaux de François de Singly et de Claude Thélot portant sur la comparaison des emplois du secteur public et du secteur privé ( 43 ). D’autre part, les travaux d'analyse cognitive des métiers ayant abouti à la classification ROME de l’ANPE seront présentés dans le chapitre quatre consacré à l'analyse des débouchés professionnels de l'institutorat ( 44 ). Enfin, le chapitre sept consacré à l’étude des trajectoires sociales nous permettra de situer notre objet par rapport aux flux de mobilité en catégories socioprofessionnelles. Pour l'heure, nous allons nous intéresser à un rapport de recherche plus spécifiquement consacré à la mobilité professionnelle des fonctionnaires. Dans une étude publiée par le cnrs, Marie-Paule Mucchielli-Marius propose de structurer la mobilité des fonctionnaires selon quatre dimensions et d'associer à chacune des dimensions deux degrés d'intensité du changement de situation professionnelle ( 45 ). Elle définit ainsi huit formes de mobilité possibles dans l'administration qu'elle reprend dans le tableau de synthèse suivant :
dimension du changement | intensité du changement | formes de mobilité |
1. Statut | changement d’ordre professionnel associé à une promotion | mobilité VERTICALE |
hiérarchique | changement d’ordre professionnel non associé à une promotion | mobilité HORIZONTALE |
2. Nature du | changement d’activité dans le même domaine professionnel | mobilité THÉMATIQUE |
travail effectué | changement d’activité correspondant à un changement de fonctions | mobilité FONCTIONNELLE |
3. Appartenance | changement de poste de travail ou d’activité au sein d’une même administration | mobilité INTERNE |
organisationnelle | changement de poste de travail ou d’activité imposant un changement d’administration | mobilité EXTERNE ou INTER ADMINISTRATION |
4. lieu | changement de lieu de travail n’imposant pas un changement de lieu de résidence | mobilité SPATIALE SIMPLE |
de travail | changement de lieu de travail imposant un changement de lieu de résidence | mobilité GÉOGRAPHIQUE |
Source : MUCCHIELLI-MARIUS Marie-Paule, 1987, La mobilité des personnels dans la fonction publique de l'état, CNRS IRESCO (page 21) |
Avant de voir ce que nous pouvons reprendre à notre compte dans ce tableau typologique, examinons les commentaires que l’auteur fournit à son propos :
‘« Une mobilité sera dite verticale ou horizontale selon ses conséquences en termes de niveau hiérarchique : la mobilité verticale par opposition à la mobilité horizontale caractérise tout changement d’ordre professionnel accompagné d’une promotion, c’est-à-dire d’un changement de grade.’ ‘Les mobilités thématiques et fonctionnelles traduisent, elles, un changement dans la nature du travail effectué. Dans le premier cas (mobilité thématique) ce changement reste de faible ampleur. Il correspond à une simple évolution de thèmes de travail mais ne remet pas en cause le rôle et la place tenus dans l’organisation, c’est-à-dire la fonction occupée. Ce peut être le cas par exemple d’une secrétaire qui se voit confier un nouveau champ d’activité à la suite d’une évolution des besoins de son service, ou à la suite d’un changement de sa division ; sa fonction de référence qui est celle de secrétaire, n’est en rien modifiée. Ce qui est touché ce sont les éléments satellites constitutifs de cette même fonction : nouveaux modes d’organisation, nouveaux produits, nouveaux interlocuteurs, etc. Par opposition, la mobilité fonctionnelle caractérise un changement profond d’activité, c’est-à-dire un changement qui correspond à l’exercice de nouvelles fonctions. C’est le cas par exemple d’un cadre administratif assurant la gestion des dossiers immobiliers au sein d’une préfecture et devenant chef de service à la direction technique. Les fondements de base de sa fonction initiale deviennent largement inopérants. Les mobilités dites internes ou externes sont destinées à caractériser le type de changement organisationnel mis en place. Tout changement de division, de service ou de direction à l’intérieur de l’administration d’origine sera considéré comme une mobilité interne. À l’inverse, la mobilité externe manifestera un transfert vers une autre administration. »À la lecture de ce tableau et de la présentation qu’en fait l’auteur, plusieurs remarques s’imposent. Tout d’abord, on peut noter avec l’auteur que la mobilité professionnelle n’est pas un phénomène uniforme mais qu’il existe « des changements de nature et d’intensité totalement différents » et que, de surcroît, ces changements ne sont pas exclusifs les uns des autres mais peuvent être combinés. Une mobilité professionnelle pourra donc relever de plusieurs formes simultanées de changement professionnel. Notons également que cette typologie concerne uniquement les changements de position professionnelle à l’intérieur de la fonction publique, limitation que nous ne suivrons pas, mais elle envisage les changements de lieu de travail, dimension que nous ne prenons pas en compte. Une adaptation de ce modèle aux spécificités de notre objet est donc nécessaire.
SINGLY (de) François & THELOT Claude, 1988, Gens du public gens du privé : la grande différence, Dunod
Penan H., 1990, « Compétence et mobilité : une approche cognitive », Cahiers de recherches de l’IAE (institut d’administration des entreprises Toulouse) – ANPE, 1993, Rome (Répertoire opérationnel des métiers et des emplois), La Documentation française
Mucchielli-MariusMarie-Paule, 1987, La mobilité des personnels dans la fonction publique de l'état, CNRS IRESCO