I.2. Les flux de promotion

L’estimation des volumes de promotion –c'est-à-dire les changements de catégories ou de corps administratifs– constitue un autre élément de cadrage qui va nous aider à situer notre objet. L’observation des mouvements internes à chaque secteur entre 1980 et 1985 montre que la promotion des agents de l’état est globalement plus faible que dans le secteur privé :

Tableau 10 : Promotion entre catégories (secteurs public et privé)
promotions (de 1980 à 1985) privé public
des postes d’employés vers les postes des professions intermédiaires H 10%
F 4%
H 5%
F 5%
des postes des professions intermédiaires vers les postes de cadres H 10%
F 6%
H 7%
F 5%
Source : F. de SINGLY, Cl. THELOT, Gens du privé, gens du public (p.72)
Lecture : durant la période, 10% des hommes et 4% des femmes du secteur privé sont passés d’un poste d’employé à un poste relevant des professions intermédiaires.

À l’examen du tableau précédent, on constate que la promotion entre catégories socioprofessionnelles concerne une faible fraction des salariés (globalement moins d’un dixième) et qu’elle est encore plus faible dans la fonction publique où elle ne touche qu’un vingtième des fonctionnaires. On note également que la situation des femmes est marquée par une forte disparité dans le secteur privé (avec un rapport hommes–femmes de un à deux), alors que les promotions sont plus également réparties dans le secteur public. Les promotions dans lesquelles peut s’inscrire la mobilité professionnelle des instituteurs –la dernière case en caractères gras sur fond gris– concernent une faible proportion des effectifs, avec une disparité entre les hommes et les femmes. L’analyse globale des « gens du privé, gens du public » par François de Singly et Claude Thélot montre donc que la mobilité professionnelle est peu répandue, puisque l’on constate très peu de sorties de la fonction publique ou de promotions d’une catégorie à une autre. On peut donc s’attendre à ce que notre objet empirique concerne très peu de personnes et constitue un phénomène très marginal. D’après les valeurs générales établies par les auteurs, on peut estimer l’ordre de grandeur aux alentours d’une personne sur vingt opérant une mobilité professionnelle. Toutefois, si ces valeurs donnent un cadre de référence, elles ne nous permettent pas d’anticiper complètement la quantification de notre objet, pour au moins trois raisons.

Premièrement, la plupart des valeurs citées sont calculées sur une courte période alors que nous nous intéressons à l’ensemble de la carrière afin de reconstituer l’ensemble des flux de mobilité professionnelle. D’ailleurs, les calculs effectués par les auteurs sur l’ensemble de la carrière professionnelle indiquent 31% de mobiles parmi les hommes entrés dans la fonction publique en 1930.

Deuxièmement, les valeurs de référence correspondent à la période des années 1980 et il est fort probable qu’il existe des fluctuations temporelles de la mobilité professionnelle (en général, et pour les instituteurs) sous l’influence des évolutions du marché de l’emploi et du système scolaire.

Troisièmement, la mobilité professionnelle des enseignants du premier degré présente sans aucun doute des caractéristiques spécifiques dues aux particularités de la position professionnelle de départ. Les sections qui suivent vont nous permettre d’évaluer les flux de mobilité professionnelle issus de l'institutorat selon plusieurs approches et plusieurs sources, en les comparant avec les données globales disponibles.