§2.- le recours à une SEML n’est pas en soi un facteur de performance

Un des avantages majeurs de la transformation d'une Régie en SEM est du point de vue théorique la faculté de procéder à des alliances économiques et à des filiations du fait des possibilités offertes en la matière par le régime juridique des sociétés.

Or, en matière de gestion des domaines skiables, aucun groupe économique émergeant est né de l'économie mixte. Chaque SEM locale est restée cantonnée dans son activité à son assise territoriale d'origine ; et le plus souvent éprouve des difficultés financières 441 .

C'est ainsi que dernièrement, l'offre de la SEMILOM gérant le domaine skiable de la station d'Orcières Merlette " n'a pu concurrencer celles des autres candidats, en réponse au cahier des charges établi par la Commune " 442 du fait de sa capacité financière insuffisante.

D’ailleurs, au plan national et toutes activités locales confondues, l’intérêt de la formule SEML est tout relatif puisque les dividendes distribuées sont pour le moins très exceptionnelles : « en l’an 2000, 4 % seulement des SEML ont pu procéder à une distribution de dividendes» 443 . La raison de cette situation réside sans doute dans le caractère de « participations de convenance » de la part des actionnaires privés. 444

Au regard du droit communautaire, l’absence de dividendes est considérée comme une aide économique indirecte. Cette pratique est d’ailleurs susceptible d’être sanctionnée 445 .

Il est également évoqué en faveur de la SEML le partenariat avec le secteur privé ce qui ferait cruellement défaut à la Régie pour son expansion économique.

Mais, en réalité, cette situation ne constitue pas un obstacle au développement des régies en matière de remontées mécaniques.

Premièrement, la carence de l’apport de compétences provenant en interne de l’actionnariat pour une SEM peut être comblée en externe pour une régie par le recours à des Cabinets conseils en développement.

En second lieu, le renforcement financier de la SEM par l’apport de capitaux privés ne se traduit pas le plus souvent par une réelle externalisation des risques financiers. En effet, ainsi qu’il ressort des observations des Chambres Régionales des Comptes, les collectivités organisatrices sont le plus souvent appelées à garantir les emprunts souscrits pour l’aménagement du domaine skiable par leur SEM d’exploitation supportant donc au final les risques financiers  .

Enfin, il est souvent avancé que l’organisation d’une SEML de statut commercial serait par nature plus performante qu’une structure publique . Or avec une régie personnalisée, les circuits de décision sont aussi rapides que ceux d’une SEM du fait de la pleine compétence du conseil d’administration pour gérer l’établissement public et des larges pouvoirs de son directeur.

De plus, la régie à l’instar de la SEM, n’engendre pas des frais de structure et autorise une réelle connaissance des coûts avec autant sinon plus de transparence .

Notes
441.

J.C Faraudo- Président du SNTF in compte rendu précité « Délégation de services publics : Quelle gouvernance pour les stations », p11 : « La préoccupation de l’actionnaire consiste à savoir s’il est rémunéré. Or, nous nous apercevons que de nombreuses SEM éprouvent de graves difficultés financières » .

442.

Revue TPBM du 29 octobre 2003 « Orcières Merlette : une nouvelle ère avec Rémy Loisirs ».

443.

rapport J. Darme  cité par C. Boiveau : « la société d’économie mixte locale, délégataire de service public » in AJDA 2002 p 1318

444.

Philippe Limouzin-Lamothe, président de la CRC Midi-Pyrénées : « La pratique de la délégation de service public », AJDA 1996 p. 572.

445.

Rapport public 2002 du Conseil d’Etat . La documentation française p 367 : « le développement des prises de participations des autorités publiques dans le capital des entreprises a conduit la Commission à adresser, dès septembre 1984, un document aux Etats membres, dans lequel elle indique sa position générale en la matière. Tout en rappelant la neutralité du Traité vis à vis du régime de propriété des entreprises, elle considère qu’une appréciation au titre de l’article 87 s’impose lorsque la prise de participation révèle un comportement qui n’est pas celui d’un apporteur de capital à risque dans les conditions normales d’une économie de marché. L’intervention publique doit être en particulier qualifiée d’aide d’Etat si la situation financière de l’entreprise, et notamment la structure et la forme de l’endettement sont telles qu’il ne paraît pas justifié d’exempter un rendement normal des capitaux investis dans un délai raisonnable. Il en va de même lorsque l’entreprise, du seul fait de l’insuffisance de sa marge brute d’autofinancement, ne serait pas en mesure d’obtenir sur le marché des capitaux les moyens financiers nécessaires pour effectuer un programme d’investissements, ou dans le cas d’une participation temporaire dont la durée et le prix de cession sont fixés d’avance de sorte que le rendement qui en résulte pour l’apporteur de capital est sensiblement inférieur à la rétribution qu’il aurait été en droit d’attendre d’un placement pour une durée comparable sur le marché des capitaux » .