Une éducation à la démocratie libérale

Dewey (1859–1952) et Piaget (1896–1980) ont tenté de développer une éducation à la démocratie libérale. La démocratie est la seule société dynamique, la seule qui tende à sa transformation perpétuelle et s’identifie consciemment avec sa propre histoire.

La démarche de Dewey est très différente de celle de Condorcet. Il ne se pose pas la question de savoir quelle est l’essence métaphysique de l’homme ( la raison, le jugement autonome) pour en déduire une forme de société (la République) fondée sur l’égalité, l’indépendance et le respect mutuels, puis, de celles–ci, une conception de l’éducation civique et morale. Son approche est qualifiée de pragmatique et d’empirique, il part de l’analyse de la société réelle, effective, où nous vivons. L’école doit mettre en pratique, dans son organisation, ses méthodes, ses contenus, les activités qu’elle propose, cette essence de la vie démocratique comme changement, diversité et réciprocité maximales des stimulations. L’idéal démocratique comporte donc l’accroissement et la diversification des intérêts partagés en commun, un rôle plus important attribué aux intérêts mutuels dans la vie sociale, une interaction plus libre entre les groupes sociaux, un réajustement continu des habitudes sociales.

Dewey renverse l’ordre des finalités, chez lui c’est l’exigence d’égalité qui est une conséquence de l’essence historique de la démocratie. Les enfants ne doivent pas seulement apprendre, grâce à l’instruction, à devenir autonomes, indépendants les uns des autres ; ils doivent aussi apprendre à communiquer, à échanger, à entrer dans une relation de stimulation réciproque et c’est pourquoi l’apprentissage de la citoyenneté est indissociablement une éducation et une instruction. L’école est comme un foyer social, la valorisation du travail par groupes, du self–government, du travail productif, des activités manuelles qui seules développent sans effort, naturellement, le sens social. L’école devient le miroir de la société.

Piaget se refuse à fonder l’éducation civique et morale sur un idéal abstrait, même rationnellement fondé. La psychologie génétique découvre le lien qui existe entre le développement intellectuel et le développement social de l’enfant ; le rôle de la coopération, du jeu, de la discussion libre pour l’acquisition de schèmes et le développement de la pensée formelle. L’utilisation de méthodes démocratiques dans l’enseignement ne se justifie pas simplement, comme chez Dewey, par la nécessité de préparer l’enfant à la démocratie dont il sera le citoyen ; elle trouve une justification épistémologique. Il y a une harmonie préétablie entre l’efficacité intellectuelle, les finalités sociales et les méthodes dites actives. En acquérant les moyens de l’autonomie du jugement et l’indépendance matérielle, l’élève acquiert du même coup les qualités du bon citoyen et le pouvoir de participer aux échanges multiples qui caractérisent la démocratie.

Piaget revendique le droit de l’enfant a bénéficier des services d’un professionnel compétent. La dimension sociale de tout apprentissage, fait obligation au maître de pratiquer des méthodes réellement actives et d’instaurer une coopération véritable dans sa classe.