B-2- L’argument scientifique : la figure de l’expert

Depuis la loi de 1838, la spécificité française est constituée par le caractère administratif et non judiciaire de l’internement181. La reconnaissance du caractère pathologique de certains actes a pris historiquement la forme d’une dénonciation des risques de la judiciarisation du placement en hôpital psychiatrique. Le sens accordé par les psychiatres à leur pouvoir d’expertise est alors celui d’une légitimation de leur compétence. Cette conception est longtemps allée de paire avec une contre-indication thérapeutique à l’action judiciaire : le malade mental accusé devait être soigné et non puni.

Mais à partir du moment où l’exigence d’un procès est formulée par les psychiatres eux-mêmes, elle vient butter sur ce qui fonde la parole du psychiatre comme tiers de la science : le débat sur l’intérêt de la judiciarisation de l’internement resurgit alors périodiquement chez les psychiatres toutes les fois qu’une réforme du Code Pénal est mise à l’ordre du jour.

Notes
181.

Dans les autres pays, l’hospitalisation de malades mentaux criminels ou délinquants est généralement du ressort des juridictions pénales ; en France, le pouvoir administratif reste le seul compétent en ce domaine, le contrôle des mesures administratives par le pouvoir judiciaire a lieu a posteriori.