II. Le triomphe de la victime à la faveur de l’argument psychanalytique

L’exigence psychiatrique d’une modification de l’article 64 du Code Pénal est ancienne, comme nous venons de le voir. La réforme de l’article si controversé va avoir lieu en 1992, après de multiples projets. Plusieurs questions se posent alors : qui d'autre que les psychiatres est à l’origine d’une telle modification ? Que va changer en pratique le nouveau texte législatif ?

Sur le premier point, l’étude de la genèse de la réforme est de nature à valider l’hypothèse d’une collusion entre l’argument psychiatrique et la prise en compte politique, non du malade mental délinquant principalement, mais de sa victime.

Sur le second point, il s’agira, après avoir constaté le caractère très relatif de l’utilité des statistiques officielles en la matière, de montrer comment le nouvel article du Code Pénal, étudié dans un contexte juridique élargi, révèle un changement dans la détermination des peines prononcées à l’égard de personnes atteintes de troubles mentaux : l’existence de nouvelles modalités en terme de peine modifie en retour le débat sur la responsabilité pénale du malade mental. Dès lors, il ne s’agit plus de réfléchir sur l’alternative "soigner et punir", mais bien sur les possibilités concrètes du soin en prison ou de la détention en milieu hospitalier. Le bilan de ce nouveau modèle, établi par la profession psychiatrique elle-même, nous fournira enfin un matériau propre à la mise en valeur de la persistance de la contradiction épistémologique évoquée précédemment.