I. Un droit naturel pour la relation médicale

Pour Hans Kelsen941, la doctrine du droit naturel est issue d’une erreur logique car elle a pour fondement le dualisme entre le droit naturel et le droit positif ; le droit naturel est tenu pour immuable et de ce fait parce qu'il pratiquerait une confusion entre le principe de causalité et le principe d’imputation, en définissant une valeur inhérente à l’homme, au lieu de la référer à une norme créée par un acte situé dans le temps et l’espace, c'est-à-dire au droit positif.

L’analyse de Marcel Gauchet sur les Droits de l’Homme s’inscrit dans la droite ligne de la pensée Kelsenienne. En effet, la transformation des droits de l’homme en une politique confirme les craintes de l’auteur de la Théorie pure du droit parce que d’après Gauchet, la consécration des principes se paie en contradictions pratiques942. Finalement, selon Marcel Gauchet, les droits de l’homme projettent dans une incertitude radicale le fonctionnement de la démocratie.

Notre objet est ici de montrer en quoi la consécration du modèle contractuel de la relation entre le médecin et son malade se paie en contradictions pratiques d’une part parce qu’il nie une particularité établie par le droit positif lui-même, l’hospitalisation sans consentement, et d’autre part, parce qu’il méconnaît la particularité psychique de la maladie mentale. Nous opérerons en deux temps : tout d’abord, il s’agira de présenter la définition politique du modèle contractuel ; puis il faudra montrer en quoi le nouveau droit soumet la pratique psychiatrique à des injonctions contradictoires.

Notes
941.

Hans Kelsen, Théorie pure du Droit (1934), Boudry-Neuchâtel, Editions de la Baconnière, Collection "être et penser", 1988, pp. 92-101.

942.

Marcel Gauchet, La démocratie contre elle-même, Paris, Gallimard, Tel, 2002, p. 332.