B-1- La généralisation de l’urgence

La loi de 1990 prévoit un nouvel article L-333-2 du Code de la Santé Publique ainsi rédigé :

‘"A titre exceptionnel et en cas de péril imminent pour la santé du malade dûment constaté par le médecin, le directeur de l’établissement pourra prononcer l’admission au vu d’un seul certificat émanant éventuellement d’un médecin exerçant dans l’établissement d’accueil". 1227

En cas de danger imminent, des procédures simplifiées permettent de mettre en œuvre une HDT sur présentation d'un seul certificat médical (associé à une demande d'admission) ou une HO par simple arrêté du maire (qui, à défaut de certificat médical, peut être prononcée lorsque le péril imminent est attesté par la seule notoriété publique). Cette disposition est conçue par plusieurs députés comme les rapporteurs du projet de loi initial comme un "progrès pour les urgences"1228. A la lecture des débats parlementaires préalables à son adoption, force est de constater que la dérive pratique d’une généralisation des procédures d’hospitalisation sur demande d’un tiers est invoquée par certains députés1229. Nous nous efforcerons d’interroger le bilan officiel de la pratique des mesures d’urgences, afin de saisir les effets mesurables de la loi de 1990.

Notes
1227.

Les directives ministérielles du 13 mai 1991 rappellent que "la référence au péril imminent en cas de certificat unique est indispensable" et "peut éventuellement être complété par la nature des soins donnés avant l’arrivée de la personne dans l’établissement dont les effets peuvent modifier les signes cliniques" (Directives ministérielles pour l’interprétation et l’application de la loi du 27 juin 1990, op. cit., p. 560).

1228.

Monsieur Chouat propose un amendement n°16 visant la suppression du deuxième certificat de 24 h en cas d’urgence ; il rappelle que jusque là, aucun certificat n’est exigé. En effet, l’article 8 de la loi de 1838 prévoit que les chefs des établissements publics peuvent se dispenser d’exiger le certificat du médecin en cas d’urgence. Jacques Toubon s’accorde à penser que c’est un progrès pour les urgences tandis que les opposants à cette suppression mettent en avant la défense des Droits des malades ; Madame Boutin voit par exemple en cette suppression "une atteinte à la garantie des Droits du malade" (Débats parlementaires, op. cit., p. 1313). Deux amendements annulant le premier certificat en cas d’urgence sont finalement adoptés à l’Assemblée nationale (Débats parlementaires, op. cit., pp. 1347-1348).

1229.

Pour répondre aux opposants à la suppression du second certificat en cas d’urgence, le Ministre Claude Evin renvoie à l’examen de régularité de la commission départementale des hospitalisations psychiatriques. André Clert, député socialiste, élu local et médecin de la santé publique ayant participé au lancement de la sectorisation, affirme à l’occasion des débats parlementaires préalables à la loi de 1990 que "toute l’évolution de la situation du malade dépend de celui qui a permis le déclenchement de la procédure". L’expérience montre d’après lui que le médecin redoute à faire un certificat médical pour un malade qui n’a pas d’antécédents connus : trouver un second médecin paraîtrait illusoire. Monsieur Clert craint que "la difficulté à trouver un second médecin soit rapidement tournée par la déclaration, soit qu’il y a urgence, soit, ce qui serait encore plus grave, que le placement d’office s’impose" (Débats parlementaires, op. cit., p. 1318)