A-2- Souffrance psychique et maladie mentale, une définition par champ

D’après Didier Fassin, "la santé est une construction culturelle (comme notion) et politique (comme espace) qui ne peut être appréhendée que de manière relationnelle"1722. Nous formulons l’hypothèse que la maladie l’est également. D’après Everett Hughes, au fur et à mesure que la matrice institutionnelle d’un travail accompli pour autrui se complexifie, de plus en plus de catégories de travailleurs interviennent dans la division du travail. Ce n’est alors pas tant le nombre de personnes impliquées qui inquiètent les professionnels que "les divergences de conceptions sur ce qu’est ou devrait être leur travail, sur la nature du mandat donné par le public, sur les possibilités et les moyens d’intervention, ainsi que sur le rôle particulier imparti à chaque catégorie, avec ses responsabilités et gratifications spécifiques"1723. Hugues nous invite donc à comparer les "philosophies" des professionnels associés pour une même activité. Nous avons choisi l’usage de l’expression "souffrance psychique" comme entrée possible pour étudier des visions politique, sociale et psychiatrique.

Notes
1722.

Selon Didier Fassin, c’est en cela que la notion de santé relève d’une interrogation sur le pouvoir. Il localise en l’occurrence les débuts d’une théorie du pouvoir, moins dans les recherches en anthropologie médicale que dans les travaux d’anthropologie sociale, les études sur la magie (Zempléni, Sindzingre, Farizang, Jean Pouillon, Olivier de Sardan, Marc Augé) ou certaines analyses des professions d’après lesquelles la question du pouvoir est constitutive de la profession (Elliot Freidson sur la profession médicale ou Robert Castel sur les spécialistes de la prévention). Didier Fassin, L’espace politique de la santé , Essai de généalogie, op. cit., pp. 14-16 et p. 35.

1723.

Everett Hugues, "Social Role and the Division of Labour", in Everett Hughes, Le regard sociologique. Essais choisis, op. cit., p. 67.