Section 4 : L’époque byzantine ou le symbole de l’artisanat

Cette époque a été dévoilée dans la zone des souks : des villas aux sols en mosaïques, des boutiques et des ateliers d’époque byzantine constituant un quartier urbain aux fonctions résidentielle, artisanale et commerciale.227

Figure 16. Localisation des vestiges byzantins
Figure 16. Localisation des vestiges byzantins Source : www.solidere-online.com

Selon Adeline Borde228, l’équipe scientifique responsable de ce site a présenté un projet de remontage des mosaïques dans la future galerie commerciale tout en utilisant le multimédia et la présentation virtuelle de vestiges reconstruits en 3 dimensions.

Idée largement appréciée par Solidere, puisqu’elle ne devrait pas bloquer ou changer son projet d’aménagement.

Dans ce cas, les vestiges retrouvés, et loin d’être conservés in situ et revalorisés dans leur cadre urbain, ils seront intégrés dans un projet de centre commercial : leur place originale sera utilisée pour la construction d’un parking de 2700 places.

‘«  Dans le quartier des souks, les fouilles ont révélé, entre autres, des vestiges de l’époque antique, mais qui ont été rasé pour aménager, à leur emplacement, 2700 places de parking nécessaires aux immeubles futurs. La rentabilité prime ici sur la mémoire des lieux. »229

Eliane Gebrane-Badlissi regrette ainsi le démontage de ce site au profit d’un parking contrairement aux responsables de ce projet qui parlent d’une mémoire qui sera conservée et revalorisée, une fois remontés dans les surfaces.

Nous remarquons ici l’usage de cette époque historique : un usage symbolique qui sera intégré dans les nouveaux espace publics fermés du centre-ville. Les souks reconstruits en se servant d’une certaine mémoire des lieux ont suscité eux aussi un large débat sur la mémoire des lieux. Ce projet sera détaillé plus tard.

Reste à signaler ici, que dans ce projet c’est la mémoire contemporaine des lieux (paradoxalement ravagés) qui prime sur la mémoire antique (elle encore démontée) et cela pour le profit du projet d’aménagement.

Figure 17. Les mosaïques byzantines
Figure 17. Les mosaïques byzantines Source : www.solidere-online.com

Enfin, dans l’église saint Georges des orthodoxes, des vestiges d’une église byzantine ont été découverts : dans la logique d’une continuité d’usage, plutôt sacré, les responsables religieux de cette église semblent réticents envers la création d’une crypte archéologique qui serait utilisée d’une manière muséographique.230

Bien que Solidere parle dans son site Internet de trace d’une église byzantine, May Davie confirme que ce bâtiment fut construit sous les Mamelouks et reconstruit au 18ème siècle dans le style ottolmano-byzantin.231

Figure 18. Eglise Saint Georges des orthodoxes
Figure 18. Eglise Saint Georges des orthodoxes Source : www.solidere-online.com

Cette époque de l’histoire de Beyrouth ( 395 ap.J.C.- 696 ap.J.C.) connut plusieurs séismes ( vers 550 ap J.C.) qui détruiront l’école de droit de Beyrouth, et plus tard la majeure partie de la ville.

Symbole de la mixité urbaine en général, et de l’artisanat et du commerce en particulier, ces vestiges byzantins seront ainsi utilisés comme « décor » dans le nouveau projet des souks : un projet qui doit lui-même encore, et selon Solidere, représenter la mémoire des traditionnels souks rasés complètement dans le cadre du même projet.

‘«  Les symboles choisis dans la mémoire collective sont qualifiés d’historiques après leur disparition. »232

Notes
227.

BORDE A., « aménagement et archéologie ; le cas de Beyrouth », op.cit. p.6.

228.

BORDE A., « aménagement et archéologie ; le cas de Beyrouth », op.cit. p.7.

229.

GEBRANE-BADLISSI. E., « la place du patrimoine urbain et architectural dans la société libanaise au lendemain de la guerre », in AKL Z., DAVIE M.F., « questions sur le patrimoine architectural et urbain au Liban », ALBA, URBAMA, 1999, p.160.

230.

BORDE A., « aménagement et archéologie ; le cas de Beyrouth », op.cit. p.83.

231.

cf, Davie chrono 1

232.

AWADA-JALU S., « de l’usage de la mémoire dans la reconstruction », in AKL Z., DAVIE M.F., « questions sur le patrimoine architectural et urbain au Liban », ALBA, URBAMA, 1999, p. 85.