c- La dimension normative:

c-1- Le Schéma Directeur Vert de Solidere et le plan de réaménagement des espaces publics, un projet urbain global ?

Comprendre cette dimension urbaine, c’est interroger d’abord l’échelle de ces références proposées : bien qu’elles interrogent dans leurs objectifs la question de relier le centre-ville aux quartiers de la capitale, ces références semblent être limitées aux limites officielles du centre-ville, de Solidere, devenue une propriété privée.

Noha Ghossainy explique le sens du plan de réaménagement des espaces publics par les cinq objectifs suivants :

La préservation du patrimoine naturel ou historique

L’intégration de la mémoire des lieux dans le cadre de vie des habitants

La valorisation du patrimoine urbain, des espaces publics patrimoniaux et des bâtiments historiques ou de grande valeur

Le développement de l’attrait des espaces publics de tous les quartiers du centre-ville, qu’il s’agisse des anciens espaces publics ou ceux envisagés dans le plan vert du centre-ville.

L’insertion dans l’environnement comme un des critères d’appréciation de la qualité de toute nouvelle opération

Ces références qui ne font pas partie d’une politique générale à l’échelle de la ville voire celle de l’agglomération ont été maintes fois critiquées d’avoir ignorer la présence de la totalité de la ville de Beyrouth. Sans oublier que le Plan Vert a été élaboré plus tard comme une certaine continuité avec ce Schéma à l’échelle de la ville.

Or selon N.Ghossainy, cette question de limite a été largement évoquée lors de la préparation de ce Schéma : création d’une chaîne d’espaces verts tout au long des boulevards périphériques du centre-ville qui seront alimentés par des places et jardins publics formant ainsi des entrées accueillantes au centre-ville et tissant par suite des liens avec la capitale.

Ce concept de « Park Avenue » et « portes vertes » a été repris dans la politique du Plan Vert, comme si cette façon de limiter les lieux formait la base de la conception du paysagiste : créer une ceinture verte capable de « s’accrocher »par les portes à une autre ceinture verte à échelle plus grande. D’où ce concept de diffuser l’aménagement vert selon un système radio-centrique ascendant.

Or jusqu’à maintenant, cette accroche entre les deux parties de la ville est toujours ambiguë laissant plus de coupure que de continuité.

D’autre part, ces références proposent de faire augmenter les espaces verts, places publiques, rues, ruelles, paysages, passages piétons…formant ainsi un réseau d’espaces publics liant plusieurs types d’espaces publics.

Ces espaces sont aménagés avec une qualité assez élevée créant ainsi une nouvelle image moderne du centre-ville : les détails architecturaux, les matériaux, les mobiliers urbains…témoignent de cette qualité. Cette qualité a été largement appréciée par les professionnels de l’aménagement, ce qui a ouvert un débat sur son adéquation et sur son harmonisation avec le reste de la ville en situation médiocre ; ceci a suscité, me semble-t-il, l’établissement d’un plan vert à une échelle plus grande, celle de la ville municipe.

Ensuite les nouveaux espaces publics proposent de tisser des liens physiques entre les différentes parties du centre-ville : ce rôle urbain sera tissé avec les vestiges archéologiques retrouvés, qui donneront sens à ces espaces. Ces espaces sont ainsi aménagés avec une très grande qualité urbaine : des grands trottoirs souvent absents dans le reste de la ville, des mobiliers urbains cohérents à l’échelle du centre-ville, une diversité urbaine et typologique des espaces publics. ( jardins, parcs, places, corniches…)

Figure 77. Analyse urbaine du concept d’aménagement : un système radio-centrique ascendant ? Source : Joseph SALAMON 2003.
Figure 77. Analyse urbaine du concept d’aménagement : un système radio-centrique ascendant ? Source : Joseph SALAMON 2003.

Quant aux formes des espaces publics proposés, elles sont plutôt modernes, géométriques et qualifiées d’Occidentales : ces formes ont ouvert un autre débat sur leur harmonisation avec les pratiques sociales des beyrouthns d’une part, et les spécificités urbaines de la ville : pour M.Davie par exemple, ces espaces publics ne répondent pas à un besoin social local, mais à des enjeux économiques et internationaux : elle critique par exemple la reconstruction des anciens souks en optant quelques tracés historiques selon une nouvelle forme : et ceci sous l’égide de conserver un certain patrimoine. En effet, il suffit de voir la maquette du projet pour sentir qu’il s’agit plutôt d’une construction d’un nouveau centre commercial qu’une reconstruction des anciens souks à « l’arabe ».

Quant à la mémoire de la ville, elle est largement évoquée dans ces références, en particulier dans le plan de réaménagement des espaces publics d’une part, et largement critiquée d’autre part : elle se base essentiellement sur la reconstruction des quartiers du Mandat Français et des souks arabes et sur le réaménagement des anciennes places symboliques du centre-ville.

D’autre part, des fouilles archéologiques ont été entamées depuis le début des travaux et sont intégrés dans l’espace public à travers des jardins publics. Ces jardins publics forment ainsi la mémoire archéologique de la ville, rappelant les références qui ont précédé l’époque arabe, en particulier l’époque romaine.

D’autres types d’espaces publics sont proposés dans ces références comme la nouvelle Marina et le grand jardin sur les remblais.