b- Dimension normative 

En commençant par l’échelle du projet, elle représente la ville en premier lieu et l’agglomération en deuxième lieu. En analysant le premier objectif de ce projet, on sent bien l’importance de la dimension environnementale qui a pour ambition de réconcilier la nature avec la ville. Spatialement parlant, cette forêt présente une surface libre très importante au niveau de la ville et qui peut servir à la restructuration de ses espaces urbains ; d’où son deuxième objectif qui tente consolider la forêt comme un vrai parc urbain.

En effet, le Bois des Pins représente à lui seul, plus de 75% des superficies d’espaces verts publics dans Beyrouth. Le bois des pins, avec ses 30 hectares (300000m2) est le principal espace vert public de Beyrouth. C’est un jardin public à l’échelle de la ville et même de l’agglomération du Grand Beyrouth. Le site est composé d’un triangle, défini par l’avenu du 22 novembre, la rue Omar Beyhum, et l’avenue Abdel Nasser, dont les côtés font 1000, 750 et 750 mètres environ, soit une superficie approximative de 30 hectares. Le terrain appartient juridiquement à la municipalité de Beyrouth, qui en assure la gestion (département des bois et jardins ). Topographiquement parlant, le site est relativement plat.

Enfin le positionnement et l’aménagement des entrées sont étudiés d’après le rapport de l’IAURIF d’une façon à l’intégrer aux quartiers qui l’entourent et à en favoriser l’accès.

Quant au troisième objectif, il porte une dimension sociale, symbolique et politique : en effet, ce projet représente l’élément essentiel du Plan Vert, voire le seul qui porte des symboles politiques et sociaux : la réconciliation des beyrouthins et la réunification de la ville : il représente un linéaire de plus que 1.02 Km dans l’ancienne ligne de démarcation qui séparait la ville durant la guerre, ce qui représente un deuxième atout symbolique et social, celui de l’intégration et de la réunification de la population beyrouthine.

Figure 82. Photo aérienne et plan du Bois des Pins.
Figure 82. Photo aérienne et plan du Bois des Pins. Source : “Aménagement du bois des pins de Beyrouth”, dossier de concours, CDR, avril 1992, réalisé par l’Institut d’aménagement et d’urbanisme de la région d’Ile-de-France

En effet, on peut bien tirer l’importance de la dimension sociale que jouait cette forêt historiquement, comme espace de rencontre, de socialisation et de loisirs entre les différents habitants de la ville de Beyrouth. En effet, sa surface, et sa situation sur la ligne de démarcation pendant la guerre, entre les “deux Beyrouth”, se voit aujourd’hui comme premier espace de réconciliation et de réunification du Beyrouth pour un rapprochement des habitants et des communautés.

La Forêt des Pins symbolise en premier lieu la “réunification de la ville”, la “vie en commun”, la “vie avec les autres”, “la vie et la socialisation entre toutes les communautés”, “l’espace public du citoyen Beyrouthin” : elle fut un espace public qui regroupait tout le monde quelque soit son appartenance, où on pourrait bien remarquer les interactions et la diffusion des références privées et communautaires pour une construction d’une citoyenneté unique.

En plus de cette dimension symbolique humaine, on ne peut négliger que cet espace public symbolise aujourd’hui un patrimoine de paysage naturel formé essentiellement du pin parasol.

Il me semble que ce projet est l’un des rares qui ont interrogé le fond du problème des espaces publics, bien qu’il soit toujours fermé à cause de ce grand potentiel qu’il porte : sa fermeture me semble comme un signe majeur que la réconciliation est loin d’être accomplie, et que la ville est d’être unifiée…