Section 4 :
Mesures d’accompagnement directes et indirectes pour privilégier l’aménagement d’espaces publics à Beyrouth 

1- Des projets ponctuels d’une politique écologique ? Le Ministère de l’Intérieur et des Affaires Municipales et Rurales 

Crée en 1993, le Ministère des Affaires Municipales et Rurales est attaché aujourd’hui au ministère de l’intérieur. En mai-juin 1998 se tenait au Liban les premières élections municipales depuis trente ans (1965) ; les objectifs se résumaient par un appui aux pouvoirs locaux, à la décentralisation, voire au développement des villes et des villages en incitant et en privilégiant un travail local qui sera établi par des acteurs locaux.

En effet, la décentralisation au Liban, créée depuis les réformes ottomanes à la fin du 19ème siècle, fut relancée par le décret-loi du 30 Juin 1977 portant un nouveau règlement des communes ; Avec les accords de Taëf en 1989, le processus de décentralisation fut relancé, mettant l’accent sur la re-dynamisation de l’échelon local ;

Ainsi, le rôle du ministère des affaires municipales et rurales est d’apporter l’appui technique et financier aux collectivités locales afin qu’elles puissent utiliser leurs compétences aussi larges pour le développement de leurs communes.

Le ministère privilégie également le regroupement des petites municipalités dans des fédérations municipales afin de renforcer leurs compétences financières et territoriales.

En effet, le Liban regroupe aujourd’hui plus de 600 municipalités environ ; quant aux compétences assez élargies des municipalités, elles seront assurées et vérifiées par le préfet de la région et par le ministre de l’intérieur afin de limiter toute déviation possible ; en plus du rôle de quelques administrations publiques qui assurent le bon fonctionnement de tout établissement public, en partie les municipalités.

Ainsi, le Ministère de l’Intérieur et des Affaires Municipales et Rurales essaie depuis sa création, en particulier après les dernières élections municipales, de favoriser le travail public local, en apportant un soutien technique et financier aux municipalités.

Quant à l’espace public, bien qu’il ne soit pas présent directement à travers une politique spécifique et autonome, il est favorisé à travers des mesures et des projets ponctuels qui se font en partenariat avec d’autres administrations publiques ou avec des acteurs privés et des associations ; ces mesures d’accompagnements à d’autres projets se résument par les tâches suivantes :

1- Favoriser l’aménagement et la création de jardins publics au sein des collectivités locales : cette tâche se fait à plusieurs niveaux en commençant par l’appui moral, jusqu’à arriver aux appuis financiers et techniques, afin d’inciter les municipalités à entreprendre ces projets. En effet, la dernière campagne lancée par le ministère de l’intérieur et des affaires municipales et rurales était une campagne du « plus beau jardin public » qui explique que la « réalisation des jardins publics dépend de la participation de toutes les instances locales (conseils représentatifs, société civile, individus…) et que ces derniers font partie des projets de développement aux niveaux social, culturel et touristique.

Quant aux grands objectifs de cette campagne « du plus beau jardin public », ils se résument par les conditions de participation au concours du « plus beau jardin public » lancé par le ministère en avril 2002383 :

Toute municipalité ou tout village désireux de participer au concours doit consacrer à cet effet un bien-fonds d’une superficie d’au moins 500m.

Un comité spécialisé désigné par le Ministère inspectera les lieux et sélectionnera les douze plus beaux jardins. Les photos de tous les jardins participants au concours seront regroupées dans un livre qui sera publié par le Ministère.

Pour servir d’espace aux activités quotidiennes, sociales, culturelles, pédagogiques, d’orientation, écologiques, sanitaires et naturelles, conformément aux raisons de sa création, le jardin public doit :

  • Favoriser les relations sociales (festivités, conférences…)
  • Favoriser les activités familiales pour trois générations ( théâtre )
  • terrain de jeu ; musique ; musée en plein air…)
  • Favoriser des activités en plein air
  • Garantir les conditions de la sécurité publique
  • Etre équipé pour les handicapés
  • Disposer de robinets (eau potable)
  • jardin public doit refléter l’identité de la municipalité ou du village, à travers :
  • L’utilisation de matériaux caractéristiques de la localité ou du village : pierres, roches…
  • La mise en valeur des caractéristiques architecturale et patrimoniale de la localité (sculptures - œuvres d’art – mosaïques – céramiques – poterie – artisanat- métiers – vestiges- patrimoine )

Enfin, les municipalités gagnantes se verront remettre des lots de valeur au cours d’une cérémonie organisée par le Ministère. Ainsi, les conditions et les objectifs de ce concours représentent le jardin public comme un vrai espace public multidimensionnel, ouvert à tout le monde, favorisant toutes sortes de relations sociales, respectant les normes d’hygiènes et techniques ; en plus, l’espace public doit respecter et refléter l’identité du lieu et son image interne, voire faire sortir les spécificités locales physiques et sociales.

Notons à cet égard, que plusieurs municipalités ont commencé à aménager des petits et moyens jardins publics depuis quelques années, afin de se construire une nouvelle image : le jardin de Furn-El-Chebbak, par exemple, commune proche du Musée National de Beyrouth, a été récemment réhabilité par la municipalité et ceci selon les demandes des habitants. Elle a soumit au CDR un projet de réfection complète avec une superficie de 2700 m afin de rapporter le soutien économique nécessaire au projet d’une part, et les besoins sociaux et physiques des habitants de l’autre part384 : trois étages en sous-sols seront constitués de parkings et un nouveau jardin déjà aménagé en surface.

2- Favoriser l’aménagement des places publiques, en incitant les municipalités à la réhabilitation de leurs places détériorées, et l’ouverture de quelques cafés-trottoirs : à l’exemple des places publiques, une coopération a eu lieu entre 2000 et 2002 entre la municipalité de Bourg Hammoud ( au Nord e Beyrouth) et le Rotary Club qui a décidé d’aménager la place de cette commune. Comme d’autres acteurs ou associations privées, le Rotary Club mène depuis quelques années un programme d’augmentation d’espaces verts dans toutes les régions libanaises ; cette coopération a donné à la fin une nouvelle place municipale, où le Rotary Club a fourni les études et le financement nécessaires.

3- Favoriser la réhabilitation des rues et des façades des bâtiments afin de donner une nouvelle image aux communes.

Ainsi, toutes ces incitations et projets ponctuels convergent en faveur de créer ou de réhabiliter des jardins publics, des places publiques, des rues et des quartiers…voire des espaces publics.

Cependant, l’absence d’une vraie politique autonome qui concerne l’espace public comme élément majeur ( bien qu’il soit défini en tant que tel dans les petits objectifs) semble laisser le travail sur les espaces publics aux opportunités…ou aux choix…

D’autre part, et dans la pratique, il semble que le souci écologique et esthétique l’emporte sur d’autres dimensions, en particulier sociale, bien qu’ils soient désignés dans les discours et souhaits.

Notes
383.

OMSAR, bulletin d’information, bureau du ministre d’Etat pour les réformes administratives, République Libanaise, avril 2002.

384.

Orient le jour, samedi 19 mai, interview avec le président de la municipalité de Furn El Chebbak.