Section 6 :
Les référentiels de l’espace public à Beyrouth : vers une cinquième synthèse 

1- Synthèses et constats 

Parler des politiques publiques des espaces publics à Beyrouth nécessite une interrogation approfondie sur les différentes politiques publiques ou privées d’espaces verts qui semblent se confondre avec ses derniers :

Pour cela, nous avons mené une étude détaillée selon 3 pistes différentes interrogeant à la fois des politiques, des projets et des mesures d’accompagnement, concernant l’aménagement des espaces publics.

Or selon notre étude, les espaces publics à Beyrouth sont présents chez la plupart des acteurs impliqués dans la reconstruction du pays :

Pour les organismes publics, ils existent à travers des projets, lois, schémas directeurs, plans de développement et politiques économiques, directement et indirectement, chacun selon ses compétences et son échelle.

Cependant, aucun acteur public, à l’exception de la municipalité ( qui se contente du plan vert) ne semble avoir mis l’espace public au premier rang, voire dans ses principales priorités à travers une politique d’aménagement qui sera consacrée aux espaces publics.

Quant aux organismes privés, ils semblent apprécier l’espace public en le mettant sur la première scène de leurs projets : là, de vrais politiques d’aménagement d’espaces publics ont été faites (Solidere) mobilisant ainsi les multiples dimensions de l’espace public pour des profits économiques, architecturaux, sociaux, privés et publics.

Cependant, ces politiques ont été largement critiqués par plusieurs acteurs et professionnels, en particulier sur l’absence totale ou partielle de la dimension sociale et de la participation des habitants à l’élaboration de leurs espaces publics.

Sans oublier que ces politiques ne se font qu’au niveau très local, sans prendre en compte la totalité du territoire beyrouthin, voire le Grand Beyrouth.

D’où nos premiers constats qui émergent à ce niveau de notre recherche :

Les politiques d’aménagement d’espaces publics sont confondues avec celles d’aménagement d’espaces verts, ce qui leur fait perdre leur multidimensionnalité en les réduisant à des questions sectorielles : ce sont plutôt des questions spatiales, environnementales et économiques qui forment les référentiels de ces politiques bien qu’elles abordent parfois des questions sociales et politiques : ces dernières ne sont pas évoquées comme une priorité dans l’élaboration de ces référentiels qui semble avoir ignoré ou mal compris la géographie du lieu qui s’impose par son échelle d’agglomération.

Au niveau de l’agglomération, aucune politique publique ou privée spécifique aux espaces publics n’a été élaborée ; par contre, il existe un Schéma Directeur qui date depuis une vingtaine d’années et qui trace l’évolution de l’agglomération tout en évoquant quelques grandes lignes sur l’évolution des espaces publics à travers toute l’agglomération : en l’absence d’une vraie politique au niveau de l’agglomération, ce Schéma se présente comme un vrai travail potentiel pour les espaces publics ; reste à le réajuster voire à le réactualiser tout en prenant en compte les derniers changements de la ville, en particulier les deux politiques d’aménagement d’espaces verts, celle de Beyrouth municipe et celle du centre-ville.

Au niveau des limites municipales de la ville de Beyrouth, une politique d’aménagement d’espaces verts remplace celle des espaces publics sous couvert d’un Plan Vert. Ce plan vert qui repose sur la renaturalisation de la ville en 5 ans semble plutôt sectoriel et modeste par rapport aux vrais enjeux socio-politiques qui entourent l’aménagement d’espaces publics intégrateurs à Beyrouth ; bien qu’il propose le réaménagement du Bois des Pins comme espace public majeur de réconciliation et de contact entre les beyrouthins, ce dernier est toujours fermé car il manque d’une vraie vision d’ensemble qui agit à la fois sur le social, sur le politique, sur l’environnemental et sur le spatial…

Enfin, le centre-ville est le seul territoire qui connaît à l’heure actuelle une vraie politique d’aménagement d’espaces publics sous-couverts d’un Schéma Directeur Vert : cette politique privée qui est menée par Solidere repose sur un référentiel moderne et de qualité qui prétend respecter les réalités géographiques et historiques du lieu : ce nouveau référentiel a l’ambition de changer l’image de la ville en proposant des espaces multidimensionnels et multifobnctiobnnels assez diversifiés ; des espaces de rencontres pour les beyrouthins, des espaces publics touristiques, des espaces publics paysagés, des espaces publics archéologiques…Or en observant les premiers espaces publics aménagés ou en cours d’aménagement de Solidere, il nous semble que ceux-ci ne convergent pas totalement avec les grands objectifs affirmés dans le Schéma Directeur Vert : ce sont plutôt les dimensions spatiales, économiques et internationales qui sont privilégiées au détriment des dimensions sociales, politiques et locales.

D’autres part, d’autres mesures d’accompagnement sont mobilisées pour privilégier l’aménagement des espaces publics à Beyrouth : des mesures économiques ( IDAL), des mesures officielles ( le ministère), des mesures privées ( LINORD), des mesures législatives ( DGU)…La plupart de ces mesures ne font pas partie d’une vraie vision globale de l’espace public or d’une politique générale, mais se présentent comme des mesures et projets ponctuels parfois trop limités et trop sectoriels.