3- Quelques éléments de réponse 

Ces différents constats issus de notre étude nous apportent quelques éléments de réponses à nos questions de recherche, en particulier à la troisième et quatrième question :

Comment sont conçus et gérés les espaces publics à Beyrouth et quels sont leurs référentiels de base ? Peut-on affirmer un certain changement de référentiel qui touche à la fois les acteurs et l’espace public de la ville ?

Selon ces constats, nous pouvons affirmer partiellement la première thèse évoquée dans la problématique, et qui interroge les référentiels des espaces publics, notamment leur capacité a concevoir des espaces publics de qualité : mais ces espaces publics et contrairement à ce qui est annoncé dans cette thèse, et dans les objectifs même de leur politique, ne semblent pas favoriser le contact et la rencontre voire la réconciliation entre les beyrouthins, qui ont été écartés de toute participation ou consultation.

Ce constat nous mène à la synthèse suivante : en convergeant avec la plupart des professionnels et chercheurs qui ont critiqué le sens des espaces publics proposés au centre-ville, ces derniers ne semblent pas répondre totalement aux problèmes socio-politiques de la ville : ils semblent plutôt privilégier l’image économique et internationale du centre-ville pour des intérêts privés en s’abstenant de penser à la fois localement et « internationalement », « sectioriellement » et globalement, à l’échelle du centre-ville et à l’échelle de l’agglomération…

Ainsi, on peut affirmer déjà qu’il y a aujourd’hui un nouveau référentiel à Beyrouth : ce nouveau référentiel plein d’ambitions, semblent réellement affecter l’image physique des espaces plutôt que les modes et pratiques sociales ; or sur le terrain, les premiers projets aménagés ou en cours d’aménagement semblent privilégier quelques dimensions sur d’autres contrairement à ce qui est annoncé dans les objectifs, en particulier en ce qui concerne le tissage du centre-ville avec son entourage physique et social.

Quant aux acteurs, ils semblent avoir changé comme les espaces : ce sont dorénavant des acteurs privés soutenus par des enjeux économiques que confessionnels, excluant toute participation ou rôle des beyrouthins et de la société civile de la ville.

En résumé, c’est l’intérêt général qui est mis en question, face à l’intérêt privé, et seul un organisme public à l’échelle de l’agglomération beyrouthine pourrait prendre en charge son établissement à travers un travail qui revalorisera à la fois le centre et les périphéries, tout en tissant des liens avec les habitants et avec les différentes mémoires de leur ville.

Mais dans quelle mesure peut-on construire la ville, sans la ville, sans ses habitants, sans ses spécificités locales ? Est-ce seulement une question d’échelle et d’organisme et tout sera bien aménagé, ou doit-on élargir notre champ d’intervention afin qu’il puisse intégrer toutes les composantes la ville, qui font d’ailleurs la ville ?

Dans la partie suivante, nous essayons de répondre à ces questions, en détaillant le rôle actuel des habitants et des usagers, voire du public beyrouthin dans la programmation et dans l’élaboration des politiques ou des projets d’aménagement d’espaces publics, même s’il semble absent jusqu’à l’heure actuelle.