UNIVERSITE LUMIERE-LYON 2
INSTITUT DE PSYCHOLOGIE
Centre de Recherche en Psychopathologie et Psychologie Cliniques
THESE
Pour l’obtention du
DOCTORAT DE PSYCHOLOGIE
Nouveau régime
TRANSMISSION PAR UN DON PSYCHIQUE
EN
TRANSPLANTATION HEPATIQUE PEDIATRIQUE
Etude clinique en milieu médical
Sous la direction de : Monsieur le Professeur Bernard CHOUVIER
Jury de thèse : Monsieur le Professeur B. Chouvier
Monsieur le Professeur A. Lefebvre
Monsieur le Professeur J-P Martineau
Monsieur le Professeur Y. Morhain
Année 2002-2003

A mes grands-parents, mes parents, mon frère,
mon mari Jean-Louis, Guillaume et Ginette.

A ma fille, Flora.

Aux enfants, parents, équipes de pédiatrie et de transplantation qui m'ont permis d’achever cette thèse ;

A mes professeurs et amis cliniciens pour leurs échanges théoriques, leur confiance, leur soutien et leur précieuse collaboration sans lesquels cette thèse n’aurait vu le jour.

REMERCIEMENTS

La réalisation d’une thèse passe par l’écriture solitaire mais avant tout elle s’est construite dans un partage et une confrontation d’opinions m’ouvrant vers des horizons théorico-pratiques insoupçonnés et des rencontres enrichissantes. La globalité des personnes ayant contribué à la rédaction de cette thèse ne peut être citée ; j’adresse ainsi, à ceux qui ont croisé mon chemin durant l’élaboration et la finalisation, un grand merci pour tout ce que j’ai appris grâce à eux.

Je remercie A. Lefèbvre, J.P Martineau, Y. Morhain de l’attention qu’ils ont porté à ce travail et je suis très honorée de leur présence comme membre du jury.

Je voudrais exprimer tout particulièrement mes remerciements aux personnes sans qui cette thèse n’aurait vu le jour.

J’exprime ma profonde reconnaissance à monsieur le Professeur Bernard CHOUVIER, mon directeur de thèse, en qui j’ai trouvé une écoute, une réflexion toujours pointue qui m’ont amenée à me dépasser, mais aussi une patience et une confiance constantes pour diriger mes recherches. Les enseignements reçus m’ont apporté une ouverture à la recherche clinique ainsi qu’un approfondissement à ma carrière de praticienne. Ce ne sont pas de simples remerciements officiels mais une profonde gratitude pour l’enseignement et la connaissance pratique et théorique « transmise »…

J’adresse mes plus sincères remerciements à l’équipe du C.R.P.P.C de l’Université Lumière-Lyon 2 qui ont contribué à étendre mes connaissances et/ou à m’aider dans l’élaboration de cette thèse par ordre alphabétique : Marie Anaut, Bernard Duez, Christian Guérin, Denis Mellier, Claudine Vacheret.

Je remercie sincèrement la globalité du personnel de l’hôpital E. Herriot à Lyon pour l’intégration, la confiance et la collaboration accordées facilitant la richesse du recueil de données. J’adresse ma profonde reconnaissance aux deux chefs de service qui m’ont accueillie dans leur unité, le docteur O. Boillot et le docteur A. Lachaux et au temps qu’ils m’ont accordé.

Je tiens à remercier Madame Madeleine Gueydan qui n’a pas participé directement à cette thèse sans oublier mes professeurs de la faculté de Montpellier.

Je remercie mes collègues pour leur contribution, tout particulièrement, Maria Pia Santelices et Françoise Douvrin ainsi que mes amies Dominique et Claudie pour leur soutien sans faille.

Je tiens à remercier ma mère pour sa patience et sa précieuse contribution, mon mari pour la mise en forme informatique et ma tante pour la traduction en anglais.

RESUME

La transplantation hépatique pédiatrique par don extra ou intrafamilial mobilise les trois protagonistes : père, mère, enfant dans une revisite familiale des fondements des processus de transmission générationnelle qui s’opèrent par l’accomplissement de ce que nous avons nommé « une transmission par un don psychique ». Ce processus organisateur d’un travail intrapsychique et intersubjectif, au sein de l’entité familiale, met en œuvre communément, quel que soit le type de don, « un processus de psychisation » selon trois phases : phase de négation d’une éventuelle T.H, phase de tentative d’identification d’un coupable, phase de conflictualité. Pour les parents, l’élément différentiel c’est la confrontation radicale à la réalité létale de l’enfant sans T.H qui entraîne « une désidéalisation brutale de l’enfant merveilleux ». La spécificité selon le type de don provient du mode d’élaboration de la « transmission d’un don psychique ». Pour les parents d’enfant T.H par don extrafamilial, cette situation traumatique réactive ou révèle une faille dans la transmission générationnelle et nécessite une (ré)élaboration du processus, soit sous la forme d’un enkystement, soit sous celle d’un dépassement ; ceci afin de mettre en travail la culpabilité et la dette occasionnée par ce don extrafamilial. Quant aux parents par don intrafamilial, le donneur réel et le donneur par délégation donnent une partie de leur foie dans une tentative de réparation autour de réminiscences d’une culpabilité générationnelle qui s’acquitte à travers le paiement symbolique d’une dette au moyen de ce don autopunitif sacrificiel. Les enfants, par l’intermédiaire des objets transitionnels, de relation et de médiation (re)visitent selon leur maturité les modalités de «transmission par un don psychique ».

MOTS CLEFS : Transmission par un don psychique – transplantation – processus de psychisation – situation traumatique – métaphore prométhéenne – désidéalisation de l’enfant merveilleux - réparation – culpabilité – don – dette.

Paediatric hepatic transplantation by means of extra or intra family donation mobilizes three protagonists : father, mother and child inanother visit of the generation transmitting process foundations which take place by carrying out what we have called « psychic donation transmission ». This process which organizes an intrapsychic and intrasubjective work, within family entity, commonly brings into play, whatever donation type, a “psychisation process” according to three phases : the negation phase of an eventual T.H, the culprit identification attempt phase, the antagonistic phase. For the parents, the differential element is the radical confrontation to the no-T.H child lethal reality which leads to “a brutal non-idealization of the marvellous child. The specificity according to the donation type comes from the elaboration mode of “the psychic donation transmission”. For the extrafamily donation T.H child parents, this traumatic situation reactivates or reals some weakness in the generation transmission and requires a new process working out, either by cysting or transcending in order to set to work the guilt and debt due to this extra family donation. As for the intra family donation parents, the real donor and the proxy donor give part of their liver in order to try to repair by remembering generation guilt which is paid off through symbolic payment of a debt by this self-punishing sacrificial donation. Children, though connection and mediation transitional objects (re)visit according to their maturity the “psychic donation transmission” procedure.

PREFACE

‘« L’articulation entre la recherche purement médicale et la recherche en psychologie clinique ne va pas de soi. En effet, actuellement, certaines études font ressortir la complémentarité entre ces deux champs. […] les transplantations hépatiques chez l’enfant sont une parfaite illustration de cette problématique. Elle met en évidence le retentissement des différents types de transplantations hépatiques sur la dynamique familiale et insiste sur les contre coups dans la psyché de l’enfant de cet acte chirurgical vécu comme une effraction corporelle. »
Bernard Chouvier, Préface de l’article de Muriel SIMON, «  transplantations hépatiques chez les enfants et transmission générationnelle   » , in le Journal des psychologues, octobre 1999.

AVANT-PROPOS

«   Savoir donner,
Donner sans reprendre,
Ne rien faire qu’apprendre
Apprendre à aimer,
Aimer sans attendre,
Aimer à tout prendre,
Apprendre à sourire,
Rien que pour le geste,
Sans vouloir le reste
Et apprendre à vivre
Et s’en aller. »
(Savoir aimer, interprétée par Florent Pagny)’

La transplantation est essentiellement un acte de don.

Quelle que soit la théorisation psychologique qui s’en suit, les parents qui donnent pour leur enfant, les anonymes qui donnent après leur mort ou les familles qui se font porte-parole d’un don, s’engagent à :

« donner sans reprendre (…)Rien que pour le geste sans vouloir le reste  »

Geste d’amour, même si, « au-delà » ou « à travers » l’étude psychologique, nous percevons des défaillances dans la transmission générationnelle impliquant des réparations psychiques, que ce soit du côté de la culpabilité ou de la dette.

C’est avant tout, un « savoir donner  ».

«  Savoir attendre,
Goûter à ce plein bonheur
Qu’on vous donne comme par erreur,
Tant on ne l’attendait plus.
Se voir y croire
Pour tromper la peur du vide
Ancrée comme autant de rides
Qui ternissent les miroirs »
(Savoir aimer, interprétée par Florent Pagny)’

Le receveur pédiatrique et sa famille attendent ce don comme ultime espoir face à une vie qui s’éteint et dont on ne comprend le sens ; juste attente en liste, pour un potentiel organe qui n’arrive jamais assez tôt ou trop tard pour certains….

Cet organe - don, attendu, espéré, fantasmé au prix de la vie, devient magique « qu'on vous donne comme par erreur tant on ne l’attendait plus  » .

La transplantation nécessite le « savoir attendre  ».

«  Savoir souffrir,

Le corps souffre… s’essouffle. L’enfant en attente de transplantation trouve la force dans le regard parental, « souffre en silence, sans murmure, ni défense, ni armure.  »

En réanimation, tuyauté dans son ventre, ses bras, sa bouche, l’enfant qui, avant la transplantation, s’éteignait, « se relève comme on renaît de ses cendres  »

C’est « savoir souffrir  ».

Et savoir donner
Donner sans rature
Ni demi-mesure
Apprendre à rester.
Vouloir jusqu’au bout
Rester malgré tout.
(Savoir aimer, interprétée par Florent Pagny)’