1-2-3 Conclusion sur le mythe

Nous pouvons dégager plusieurs points théoriques en référence avec notre population étudiée. Prométhée naît en tant que fils de Japet et de Clyméné. Il est porteur des désirs parentaux, « fils roi » enfant merveilleux, selon la terminologie de Serge Leclaire par « une pensée prévoyante ». Il poursuit la mission qu’il s’est assigné : éclairer l’Homme de ses connaissances en s’opposant constamment à Zeus, père primordial de la nouvelle génération des Dieux. Cette confrontation sous forme de jeu ne trouve pas son sens au premier abord pour Prométhée.

Cette assignation de Prométhée à cette place de défenseur de l’Homme est un leurre. Elle lui est transmise inconsciemment par ses liens de filiation et d’affiliation dont il dépend par sa lignée maternelle avec sa grand-mère, Gaïa et sa mère.

Un événement le voue à finir ses jours enchaîné à un rocher. Ce choc brutal est assimilable à une situation traumatique à laquelle rien ne le prédestinait puisque, comme son nom le définit, Prométhée est l’homme de « la pensée prévoyante ». Malgré ce don octroyé à sa naissance de prévoir les événements, une partie échappe à Prométhée. Il demeure aveugle aux événements du passé. La transmission de génération en génération est non prévoyante laissant augurer d’un insaisissable.

Il faut cet événement brutal dans son corps, de ce déchirement sans fin renouvelé, pour que Prométhéeprenne acte d’une pensée non prévoyante et tente d’élaborer un sens symbolique en lien avec son histoire familiale. Cette intrusion dans son corps l’amène à s’interroger sur le sens de sa situation par un travail d’élaboration, que nous nommons « processus de psychisation », reconnaissance d’un principe destructeur organique pour s’en libérer et parvenir au secret de cette « transmission par un don psychique », et ainsi, pouvoir le transmettre à qui de droit, Zeus.

Comme le formulent I. Duret et A. Lefebvre le sujet «  tente de gérer – sens/ signification et sens/histoire/filiation/généalogie – cet impossible compromis entre le même et le différent, compromis qui fonde le sujet dans ses liens de reconnaissance identitaire. »53

Tout comme le transplanté doit expérimenter la nécessité d’une transplantation par la mise en acte d’une représentation réelle dans son corps d’une défaillance de la vie et du transmis familial, de même Prométhée expérimente dans son corps le sens de ses agissements envers Zeus. Ce « processus de psychisation » amorce par ce choc au réel une représentation symbolique de la défaillance du transmis psychique par une trace physique repérable dans le corps du patient, pour lui-même et pour sa famille.

La transmission psychique d’une défaillance générationnelle est interrogée par cette situation traumatique. Nous l’avons identifiée de « transmission par un don psychique » et non de transmission générationnelle suite à la situation traumatique spécifique entre organique et psychique.

Cet objet concret, l’organe foie de Prométhée, devient à un niveau psychique une représentation du transmis sous forme de don familial. C’est en ce sens que nous développons le concept des auteurs contemporains pour intégrer au concept la notion de don qui nous apparaît comme inhérent à la problématique de la transmission générationnelle face à une pathologie initiale de type organique qui par la suite réinterroge du psychique.

Mais pour ce, nous allons succinctement redéfinir le terme de transmission et de transmission générationnelle afin de définir d’un point de vue théorique notre concept de « transmission par un don psychique ».

Notes
5.

3 Duret I., Lefebvre A. (1997), “Cherche vraie famille à tout prix”, p 55 – 69.