1-3 Conclusion théorique

Ce travail de l’inter et du transgénérationnel souligne la mobilisation d’une violence, fondamentale selon J. Bergeret et nous renvoie aussi aux travaux de C.Vacheret sur ce thème, par l’intrusion psychique, physique confusionnelle de l’individuel, du groupal interne ou externe au groupe d’appartenance dans « la transmission par un don psychique ». Pour notre part, nous évoquerons le terme plus général de violence faisant effraction dans la représentation psychique.

La violence fait tellement partie intégrante de la transplantation que son évidence en devient une composante à part entière. La participation à un colloque sur le thème de la violence dans la transmission (Lausanne, 1999) nous a amenés à penser la violence en transplantation. Paradoxalement, la violence est quotidienne dans le travail auprès des familles, mais elle n'est jamais verbalisée, elle est vécue. La violence reste dans le subir et non dans la mise en mots. C'est l'impensable et la relecture des situations cliniques sous l'axe de la violence qui ont donné un nouvel éclairage à cette problématique.

L’acte de transplantation permet à un niveau psychique que se retravaille le rachat parental de la dette culpabilitaire fantasmatique afin de faire advenir symboliquement l’enfant malade à la vie dans la représentation familiale. Cette souffrance psychique peut, elle aussi, être lue comme une violence du don transmis. La transmission est cette trace à travers les générations. La pathologie hépatique d'un enfant et la violence d'une réalité létale confrontent les parents à cette absence ou cette défaillance dans leur transmission symbolique.

Cette transmission réactive certaines traces à travers les générations. La modification d'état d'un enfant sain, à pathogène, marque un passage, un changement, et implique des transformations psychiques dans la représentation parentale de l'image infantile.

Ce processus de transmission est sous-tendu à un mandat générationnel qui va devoir se réélaborer du fait de la pathologie de l'enfant, puisque non réalisable. La transmission initiale des parents en sera modifiée. Elle se construira autour de la maladie de l'enfant.

L'acte de transplanter métaphorise cette scène de transmettre quelque chose à quelqu'un. Cette mise en scène de transmettre se scénarisera et se jouera pendant les temps d'hospitalisation à un double niveau :

1°) organique : transmission d'un don d'organe.

2°) psychique : « transmission par un don psychique» parents/enfant.

La violence dans le transmis est présente quel que soit le type de don mais elle éclaire le processus de « transmission par un don psychique » d’autant mieux lorsque le don est extrafamilial puisque les parents sont dépossédés de « réparer » eux-mêmes leur enfant. Cette effraction se situe alors à un niveau psychique. Nous proposerons d’exposer, à partir d'une situation clinique, le vécu familial des résonances psychiques induites par la violence de cette effraction dans le corps de l'enfant.

Cette violence de la réalité de mort impose un accompagnement et une expression spécifique de la souffrance. C’est par conséquence une violence physique mais aussi psychique à l’état brut qui est verbalisée par les parents dans un discours corporisé du non-sens de la situation vécue, en tant que parents vis à vis de leur enfant et, au-delà, dans leur propre histoire familiale. C’est ainsi que certains parents parviendront à un dépassement de la situation traumatique remobilisant du générationnel et pour d’autres, au contraire, un enkystement dans une rupture demeure le mode de réponse.