Conclusion :

La patiente est dans une phase régressive s’exprimant par un désintérêt provisoire pour tout ce qui est en lien avec le monde extérieur. Seuls existent, elle… et sa fille qui n’est autre qu’un prolongement d’elle-même et non une entité séparée. Joyce M. Dougall parle « d’hystérie archaïque » où la psyché du sujet fonctionne dans une sorte de corps pour deux. L’effacement de l’environnement est nécessaire au sujet pour se reconstruire à travers cette phase de régression nécessaire après les mobilisations psychique et physique demandées au sujet.

Cette mère, par le don qu’elle concède à sa fille, se sépare de cette blessure d’avoir donné la vie à un enfant malade, mais « au-delà », par cette T.H, s’est autorisée à expérimenter sa propre mort tant redoutée.

La fusion, corporelle et psychique, qu’elle laisse percevoir à travers, cette rencontre retranscrite (être persuadée que sa fille va mal), cette mise en scène des volets fermés et son désir de se couper du monde, laissent apparaître un fantasme d’incorporation de l’autre où sa fille et elles ne forment plus qu’une entité. Ceci permet le maintien illusoire de l’absence de disparition irrémédiable de l’objet perdu. Cet objet ne serait-il pas, ses années perdues ? Mme est focalisée sur « l’objet perdu » par un repliement physique, un envahissement « idéationnel », et de ce fait scotomise la réalité d’un entourage en attente.

(…)

….Après deux années…

Résumé de l’évolution de la situation d’un point de vue psychologique :

- des complications organiques ont multiplié les hospitalisations. Mme est à la limite de « craquer ». A sa dernière visite, elle est repartie avec Hélène sous son bras et son fils. Mme criant : « ils veulent tuer mon enfant et je préférerais que nous mourions » Son fils était pétrifié d’effroi. Ceci a eu pour conséquence, un trouble somatique de Caïn nécessitant une médicalisation.

- la situation avec les équipes infirmières est assez tendue et tout geste médical est vécu comme une intrusion mortelle dans le corps de son enfant. Quant à Hélène, elle maintient de bons rapports avec l’équipe tout en laissant apparaître, lors d’examens médicaux, une irritabilité pouvant aller jusqu’à des cris. Mais à ces moments là, la mère est, elle aussi, dans le même état…

L’équipe m’exprime son inquiétude par rapport à Mme H.. Les infirmières ont de plus en plus de difficultés à pratiquer les gestes médicaux, chacune évoquant son angoisse lorsqu’elles doivent prendre en charge Hélène. La mère est très fragilisée par les différentes ré-hospitalisations de l’enfant et examine chaque geste, montrant son peu de confiance dans le milieu médical.

Après un temps d’absence dans le service, je retrouve Mme H. qui spontanément vient à ma rencontre mais est très angoissée par le fait de se rendre dans le service. De plus, elle est en retard et se dirige rapidement après quelques mots brefs échangés vers les infirmières.